LA
GUERRE
En 1941 la guerre sous-marine fait rage en Atlantique, 1299 navires totalisant 4 328 588 tonnes sont torpillés.
En 1942 la perte totale représente 7 790 697 tonnes. Octobre est le mois le plus fort de l’année avec le torpillage de 117 navires jaugeant plus de 700 000 tonnes !...
Ces pertes sont loin d’être compensées par les chantiers navals alliés. Parmi les remèdes apportés pour stopper l’hémorragie (déplacement en convoi, renforcement de la protection, utilisation de radar perfectionné, utilisation de grenade sous-marine…) il en est un, sans précédent, mis en application dans la construction navale pour remplacer le tonnage perdu et qui perdurera jusqu’à aujourd’hui : La construction de navire en série.
Le 19 février 1942, le Président Roosevelt lance le plus grand programme de construction navale de l’histoire au cours d’une conférence sur les transports maritimes. L’objectif est clair : La capacité de production devra être toujours supérieure au tonnage perdu.
L’amiral Land, placé à la tête de l’administration de la construction de guerre pour les transports maritimes reçoit l’ordre de produire 24 millions de tonnes avant la fin de l’année 1942.
Les Etats-Unis, de la Côte Ouest de l’Atlantique à celle du Pacifique, et le Canada vont devenir un gigantesque chantier naval.
Devant passer leurs livraisons de 1 à 3 pour satisfaire la demande, les chantiers vont utiliser des techniques de production de masse, dérivés des chaînes de production automobiles, travaillant sur une conception standart et utilisant largement la soudure électrique et les éléments standart préfabriqués entraînant la disparition du rivetage de coque.
Vers la fin de la guerre 99 chantiers nouveaux avec des effectifs de l’ordre de 1 million et demi d’ouvrières et ouvriers étaient en service. Le Liberty fut désigné avec la référence EC2 (Emergency Cargo two) et adopté par l’état major de l’amiral Lang d’après les plans d’un vieux navire britannique baptisé «Océan», version simplifiée du «Darrigton» court dessiné et construit en 1939 par les chantiers navals J.L Thomson and Sons, de Sunderland (côte est de l’Angleterre).
Et c’est le 27 septembre 1941, jour proclamé «liberty fleet day» que, lors du lancement du premier EC2 baptisé «Patrick Henry », au chantier du groupe Bethlehem Shipbuilding Corporation à Baltimore, que les «vilains petits canards» prendront le nom de «Liberty». C’est en 1942, à cause de la faible vitesse des Liberty, que seront lancés les Victory et les T2. Les Victory construits pour la Royal Navy anglaise porteront le nom d’Empire.
Quatre catégories de navires vont être définies et construites chacune à des centaines et des centaines d’exemplaires :
Cargo de 10 350 tonnes type
Liberty,
vitesse = 12 noeuds, de 1200 cv - machine à vapeur
Cargo de 13 000 tonnes type
Victory, vitesse = 16 noeuds - turbine à vapeur
Pétrolier de 16 000
tonnes type T2, vitesse = 12 noeuds - turbine à vapeur
Cargo de 7 000 tonnes type
Pocket
Liberty
Ce type de navire, sans technique d’avant-garde, mais en avance sur son époque, de par la conception de ses formes, de la disposition rationnelle de ses aménagements, de la simplicité de la machine et de la mâture, va révolutionner après guerre le monde de la marine marchande.
Un navire construit pour être
coulé… Pourtant rien n’est laissé au hasard, tout à
bord est fini et équipé de matériel d’une solidité
à toute épreuve. Les équipages vont découvrir
ce que pouvait représenter le grand confort, car à cette
époque, sur tout autre navire, le poste d’équipage était
commun, réfectoire y compris. A l’inverse le «Liberty»
était équipé de douches, de cabines de 4 personnes
maxima, et de radio dans les réfectoires. Les intérieurs
étaient peints de couleurs claires et gaies afin de rendre la vie
plus agréable à bord.
De plus, la machine était
silencieuse et fiable, le seul point faible provenant des chaudières
sur lesquelles l’on changeait très souvent les tubes. Du point de
vue performance, de part les formes arrière de la coque, ce bâtiment
en charge pouvait naviguer à 12 nœuds avec seulement une machine
de 1200 CV.
L'EMPIRE
BROADSWORD
(Plaque de construction du
navire)
En 1943 l’Empire Broadsword sort des chantiers de la Consolidated Steel Corporation Ltd à Los Angeles (Californie - USA)
Il est livré en contrat
de prêt location à la Royal Navy en décembre
1943 et Le ministère du transport de guerre anglais l’affecte comme
transport de troupes d’infanterie (Loading.Ship.Infantery)
à la Cunard White Star Line (Vous avez dit TITANIC ?)
Le 6 juin 1944, il participe au débarquement en Normandie en débarquant la 3 ème division d’infanterie anglaise sur la plage de Sword Beach.
Le 2 juillet 1944 vers 18 h 35, après avoir débarqué des troupes britanniques sur les plages normandes, il heurte 2 mines, non loin des restes du port artificiel d’Omaha Beach (Viervilles sur mer à Saint Laurent sur mer), faisant 7 morts parmi l’équipage. Le musé des épaves de Commes à la sortie de Port en Bessin, possède des photos relatant ce naufrage ainsi que des objets divers. (Un repli efficace conseillé en cas de coup de tabac en mer, pour ne pas perdre votre journée !... A visiter absolument pour les inconditionnels des beaux objets, de l’histoire navale du débarquement et de la ferraille !)
l'EMPIRE BROADSWORD vu par l'oeil de Patrice STRAZZERA
L'EPAVE
L’épave repose en 3 parties principales sur un fond coquilliers par 22 à 28 m de profondeur, suivant les marées. Repérée par sa grosse bouée cardinale Est, à 3 milles du village de Viervilles sur Mer, elle est inscrite au S.H.O.M. sous le n° 145 90 130. Elle est couchée sur tribord l’avant tourné vers l’Ouest.
L’arrière vers l’Est conserve son mât de charge dont l’extrémité se trouve à peine à une dizaine de mètres de la surface. En regard de la présence d’une faune riche et diversifiée et de sa présence non loin de la côte, cette épave est aussi devenu un spot de chasse sous-marine prisé "en automne", pour y avoir vu plusieurs fois des chasseurs et notamment par marée haute !
Les années passant, la «vieille dame » prend de l'âge, et il convient de se montrer de plus en plus prudent lors des plongées, pour l’avoir connue en meilleur état. C’est une plongée qui demeure néanmoins absolument incontournable comme celle du L.S.T. 523, avant écroulement complet de ces carcasses.
Lumière sur l'EMPIRE
BROADSWORD - Patrice STRAZZERA
PLONGEE
SUR L'EMPIRE BROADSWORD
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«Visi d’enfer !» : me lance Abel, de retour en surface. Nous sommes mouillé sur la partie avant d’une épave très connue de la côte Normande, non loin de la plage d’Omaha Beach, l’Empire Broadsword.
«Combien ?» je lui lance, « au moins 15 mètres ! » me repond-t-il. Je l’aide, lui et son coéquipier à réintégrer le bord.
L’Empire, un « Liberty Ship » transporteur de troupes, par une visi pareille, ça doit être le pied ! C’est la 31 ème fois que je vais effectuer "une plonge" sur cette belle épave, balisée par une bouée cardinale. J’emmène avec moi un nouveau niveau 2, Patrick, et connaissant très bien chacun des 4 morceaux de l’épave, je décide d’essayer pour la première fois de lui faire découvrir en une seule plongée l’épave complète !
Nous descendons dans
une eau verte et limpide le long du mouillage, jusqu’au sable. Effectivement
ce serait dommage de ne pas profiter de cette occasion magnifique de faire
le tour du propriétaire ! Nous sommes par - 27 mètres de
fond prés de la quille de l’étrave de l’épave et j’en
profite pour modifier l’emplacement de l’ancre en la plaçant les
2 pattes sur une tôle verticale, afin de pouvoir la décrocher
sans être obligé de redescendre dessus.
Arrivé à la proue, nous découvrons l’ensemble du pont, tout en remontant en pleine eau. En nous écartant et en nous stabilisant dans l’axe de celui-ci, à une dizaine de mètres à peine du fond, nous parcourons les yeux écarquillés, cette partie avant gisant couchée sur le flanc tribord. Les 2 tourelles bâbord et tribord des canons anti-aériens de 20 mm dont les cartouches parsèment le sable, apparaissent ainsi que les ouvertures sombres des cales avant.
Nous parvenons à la cassure. En dessous de nous, un champ de tôles éparses s’offre à notre vue. Ce sont les restes bien identifiables des parois de la coque. Un coup d’œil en arrière pour prendre l’alignement et nous nous élançons en pleine eau, toujours à demi profondeur.
Déjà au loin apparaît la partie retournée de la coque centrale avec une de ses 2 bordures anti-roulis, la quille, puis sur la gauche à quelques mètres l’ensemble des superstructures, le château avant avec ses emplacements de hublots de façade avant caractéristiques où se trouvait la plaque de construction, le tout retourné tête en bas. Nous pénétrons dans celui-ci et effectuons le tour complet par les coursives. Les réceptacles des douches sont toujours au plafond, un grand miroir nous renvoi nôtre image, et il y a toujours autant de surprenantes découvertes à faire dans cette partie de l’épave qui devient au fur et à mesure des années de plus en plus "branlante".
Depuis le haut de ce château, nous rejoignons la coque centrale, la longeons pour aboutir à une cassure. Et, comme sur la partie avant, le même spectacle s’offre à notre vue, le même champ de tôle.
Cap légèrement sur tribord, pour rejoindre la partie arrière, celle la plus connue des plongeurs et chasseurs de bars expérimentés, que nous atteignons en évoluant toujours à mi-profondeur afin de pouvoir remplir mon objectif premier. Le mat de charge, toujours debout sur le pont incliné lui aussi sur tribord, apparaît au loin. Nous passons sous celui-ci en effectuant un dorsal, tout en prenant la direction du canon arrière de 105 mm toujours en place, mais sa soute maintenant vidée de ses obus dont quelques douilles traîne encore un peu plus bas. D’abord le passage au-dessus de la cale arrière, a visité absolument, mais pas ce jour là car il faut choisir, puis le fameux canon. Un arrêt sur celui-ci s’impose, le temps d’apercevoir plus bas nos amis anglais affairés et un peu moins préoccupés que nous de la gestion du temps qui passe, car équipés de blocs Nitrox ! Il est temps de rentrer d’ailleurs.
Nous repartons le long du bordage ajouré, après avoir fait le tour de la poupe, tout en observant plus bas l’évolution des plongeurs Anglais. Une fois la cassure atteinte, je reprends mon cap, toujours à mi-profondeur en direction de la partie avant, et en cours de route nous observons distinctement sur notre droite, dans ce vert bouteille, les masses déjà parcourues à l’aller. Un léger courant nous aide pour le retour.
Enfin j’aperçois le bout du mouillage, et nous nous y dirigeons tranquillement savourant chacun de notre coté notre réussite et, rien que le regard de mon coéquipier me suffit. Un coup d’œil sur l’ordinateur, 35 mn d’écoulé, nous entamons notre petite remontée «cool» jusqu’au palier de 3 m, le long du bout, puis ensuite jusqu’au pneumatique.
C’était la première fois et la seule fois, que j’ai pu en faire le tour complet en "une plonge" ! Mais j’avais un net avantage, c’est d’avoir déjà fais le croquis de cette épave depuis quelques années.
Torché Michel le 15
août 2000 après J.C
Emplacement dessin
« Epave de l’Empire en
août 1990 »
REMERCIEMENTS
- CREDITS PHOTOS
Un
grand merci à Patrice STRAZZERA pour ses clichés toujours
grandioses
Retrouvrez
l'univers de Patrice en lui rendant visite à l'adresse suivante
BIBLIOGRAPHIE
& REFERENCES
Sawyer LA and Mitchell WH, Victory
Ships and Tankers, David & Charles, 1974
Sawyer LA and Mitchell WH,
The Liberty Ships, Cornell Maritime Press, 1970
Sawyer LA and Mitchell WH,
The Empire Ships, Lloyd’s of London Press, 1990
British Vessels Lost at Sea
1939-1945, Patrick Stephens Ltd, 1984
U.S. Maritime Service Veterans, American Merchant Marine at War |
Reproduction
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