HMS BRITOMART & HMS HUSSAR
Deux dragueurs de mines de la First M.S.F.
Sources
: SAGA DES ÉPAVES DE LA COTE D'ALBÂTRE
Accès à la fiche technique du Hussar ou du Britomart notre base de données
Mise
à jour
13-Oct-2009 21:14
27 août 1944
Une regrettable erreur coûte la
vie à 78 marins anglais !
HISTOIRE
Le débarquement en Normandie nécessita le déploiement de nombreux dragueurs de mines pour nettoyer les chenaux d’accès à la flotte d'invasion. C'est ainsi que la First M.S.F. eût pour mission dès le 5 juin 1944 de draguer les approches de la plage Sword pour permettre le passage du convoi S1. Elle s'occupa ensuite de maintenir saine la route entre Portsmouth et Arromanches.
Le 22 août, elle reçût instructions de nettoyer un champ de mines magnétiques allemandes entre Fécamp et le Cap d'Antifer. En effet, à cette époque la Kriegsmarine n'est plus un danger pour la Royal Navy qui bloque littéralement les accès aux champs de bataille. Ne reste que la menace des mines omniprésentes dans la zone.
On estime à 7.000 le nombre de mines mouillées par les 2 camps ! Il faut aussi savoir qu'un tiers de l'activité de la Kriegsmarine entre janvier et avril 1944 avait été consacrée à la mise en oeuvre de ces engins de mort.
Avec l'avancée des troupes alliées et la traversée de la Seine, l'assaut de la "Festung" du Havre apparaît comme imminente. Il faut "préparer" le terrain à l'offensive terrestre par une série de bombardements navals pour réduire au silence les différentes positions fortes allemandes ceinturant la ville. Cette tâche est confiée au cuirassé HMS Warspite et aux monitors Erebus et Roberts. Avant d'engager cette action, il est indispensable d'effacer les champs de mines gênants.
Après 4 jours de travail sur zone, la First M.S.F. composée des navires suivants :
HMS Jason,
HMS Hussar,
HMS Britomart
HMS Salamander
bénéficient d'un jour de relâche à Arromanches.
UN
CHANGEMENT D'INSTRUCTIONS FATAL
Dans la soirée du 25 août, Trevor Rick, commandant en second de la flottille reçoit instructions de retourner dans la matinée du 27 août au nettoyage de la voie d'accès Portsmouth/Arromanches. Estimant que le champ de mines au large d'Antifer présente toujours un danger, Rick obtient une extension de 24 heures pour en terminer le dragage.
L'état-major de la flottille transmet alors les nouvelles instructions modifiées aux autres services inter-armées. En effet, il est impératif que tous les mouvements de navires alliés à proximité des côtes françaises soient connus et transmis aussi bien aux commandements de la Royal Navy mais aussi à la Royale Air Force ainsi qu'à toute l'armée afin d'éviter une erreur.
Le signal modifiant les ordres de la flottille est reçu par le HMS Jason dans la matinée du dimanche 27 juste avant que les navires ne lèvent l'ancre pour les opérations de la journée. Les conditions météorologiques sont excellentes pour le dragage de mines : mer d'huile et bonne visibilité.
Les dragueurs sortent et se déploient. Les HMS Britomart, Jason et Salamander font route de front, ce dernier étant le plus proche de la côte. Sur l'arrière du Britomart, on trouve le HMS Hussar qui connaît des difficultés avec son gouvernail. A bord du Salamander, le trawler Colsay mouille des bouées pour marquer les chenaux dragués imités en cela par le Lord Ashley. Un peu après midi, un avion de la R.A.F. survole le convoi à basse altitude répondant aux signaux amicaux des membres d'équipage présent sur le pont.
Les navires en sont à leur 3 ème ratissage à 13 h 30 lorsqu'un groupe d'avions sort du soleil et se met à piquer vers la flottille. Identifiant les appareils comme des Typhoons, Crick lance aussitôt un message radio pour informer que ses navires sont attaqués par des avions amis, espérant ainsi stopper l'attaque en cours. Malgré un 2 ème message envoyé à 13 h 34, les piqués des Typhoons ont laissé la flottille en feu ! En effet, chacun de ces avions ont une puissance de feu redoutable puisqu'une bordée de 8 roquettes correspond à la salve d'un croiseur avec ses 8 canons de 203 mm !
DES
DEGATS INESTIMABLES
Le Britomart qui a subi de plein fouet le premier passage n'est plus qu'un fatras de ferraille. La passerelle et sa cheminée sont détruites, le commandant le Lt Cdr Galvin est mort. Le pont supérieur n'est plus qu'une masse de métal informe et personne ne peut plus passer de la proue vers la poupe. Heureusement, l'officier mécanicien J.R.D Gregson a eu la présence d'esprit de couper la traîne de dragage. Le Lt Cdr Johnson, officier en attente d'un commandement, embarqué sur le Britomart pour s'aguerrir à la lutte contre les mines se retrouve alors plus haut gradé survivant à bord. Voyant le navire désemparé et dérivant vers un champs de mines, il ordonne l'abandon du navire.
Situé à la même
hauteur que le Britomart, le Hussar n'est pas dans un meilleur
état. Sa passerelle a reçu de plein fouet des roquettes et
des obus de 20 mm. Son officier de navigation a également été
tué sur le coup. Son commandant, le Lt Cdr Nash est sévèrement
touché aux jambes et son bras droit est arraché. Les communications
avec la salle des machines sont coupées.
Néanmoins, depuis
le carré des officiers, un matelot a eu la présence d'esprit
de mettre le chadburn sur la position d'arrêt d'urgence. Stoker
Hal Booty qui n'était pas de quart au moment de l'attaque et
qui prenait le soleil sur le pont nous explique :
"Je m'étais assoupi et je fus réveillé avec fracas
par un bruit bizarre. C'est alors que je vis le dragueur de mines devant
nous (le HMS Britomart) entouré de gerbes d'eau et un avion en piqué.
Nous avons sauté et couru pour rejoindre nos postes de combat mais
je ne pus jamais atteindre la salle des machines qui ,touchée par
des roquettes, était en feu. Des hommes morts ou terriblement blessés
jonchaient le sol."
Le télégraphiste
Stan
Timothy était de ceux présents sur le pont :
"Peu
de temps après, le Hussar fût parcouru d'une terrible secousse
et commença à rouler sur bâbord. Les systèmes
électriques et de vapeur étaient hors service. Je pensais
que nous avions heurté une mine magnétique mais je ne pus
atteindre le local radio où tout le personnel avait pu s’échapper.
Je me dirigeais vers le bastingage tribord en escaladant le pont en pente,
je me suis aperçu qu'une écoutille bougeait. J'ai alors aidé
ceux qui se trouvaient à l’intérieur en leur lançant
un câble qui pendait à proximité. Une tête est
sortie et a dit "pas trop tôt". En compagnie d'autres membres d'équipage,
j'ai glissé sur le côté tribord et nous nous sommes
éloignés à la nage, le Hussar coulant par la proue."
A 13 h 42, l'attaque était terminée. Il avait fallu moins de 12 minutes pour détruire 3 dragueurs de mines. Du pont du HMS Jason, le Lt Cdr Crick observait le reste de sa flottille. Le Britomart en feu gisait sur bâbord. Le Hussar était désormais au fond de La Manche.
Le Salamander était en flammes au niveau de la proue en feu. Le Lord Ashley avait reçu des obus. Crick ne peut rien faire d'autre que lancer un appel radio pour demander l'assistance de remorqueurs et de commencer les opérations de repêchage des survivants. C'est à ce moment, que les batteries côtières allemandes en profitèrent pour ouvrir le feu. Devant la précision de celles-ci, le Jason est bientôt obligé de se mettre hors de portée laissant le soin aux chaloupes du bord de récupérer les hommes à la mer. Malheureusement ce feu dense augmenta le nombre de victimes.
LE
RETOUR EN ANGLETERRE
Repêché par une baleinière, le Lt Cdr Johnson fût transféré à bord d'une vedette de la R.A.F. . Le constat était terrible : il y avait des cas désespérés mais tous faisaient preuve d'un immense courage". A 15 h 00, le sauvetage était fini et le Pytchley reçut l'ordre "d'achever" le Britomart. Les navires mirent le cap sur Arromanches. Le Jason s'arrêta en route pour immerger son mort.
A Arromanches, les blessés furent transférés sur des navires-hôpitaux ou dans des camps de l'armée avant de regagner Portsmouth. Interrogés, les survivants bénéficièrent d'une convalescence de 14 jours avec instructions de ne rien divulguer. Officiellement, il s'agissait d'une attaque allemande.
A bord du HMS Gozo, l'officier commandant descendit remercier ses sauveteurs et prononça devant tous les paroles suivantes " Oui, les Spitfires et Typhoons étaient anglais mais avaient été capturés par les allemands qui s'en servaient". Tous les témoins éprouvèrent alors le même sentiment. Cette affirmation nous soulagea et nous fûmes tous d'accord pour dire que c'était bien là une ruse des allemands et notre haine n'en fût que plus grande".
L'ENQUETE
L'Amiral Sir Ramsay mit peu de temps pour découvrir les causes réelles du désastre.
L'état major du HMS Ambitious, (Q.G. des dragueurs de mines) avait oublié d'informer l'officier en charge de la zone de combat (Flag Officer British Assault Area - F.O.B.A.A. - l'amiral J.W Rivett-Carnac) du changement des instructions de la First M.S.F. en ne reportant pas sur les ordres modifiés "(R) F.O.B.A.A." (repeated to F.O.B.A.A.).
Dans la matinée du 27, une station radar côtière détecte la flottille et la classe comme hostile, aucun mouvement de navires alliés n'ayant été prévu sur zone. Un appareil de la R.A.F. est alors envoyé en reconnaissance et a un visuel sur une force de dragueurs de mines apparemment amicale. La R.A.F. demande confirmation au F.O.B.A.A. qui assure qu'ils ne peuvent être anglais. Cependant pour lever tout doute suite à l'observation aérienne, le F.O.B.A.A. tente de contacter le HMS Ambitious pour connaître la position de ses différents dragueurs de mines. Une panne du réseau de communications empêche de joindre le HMS Ambitious et aucune autre tentative n'est faite !
L'enquête mis en évidence « de sérieuses lacunes dans la chaîne hiérarchique de l'état major » et recommanda des sanctions disciplinaires. Trois officiers passèrent en cour martiale à Rouen pour leur rôle dans l'attaque des dragueurs de mines.
Le responsable des opérations
du F.O.B.A.A., le Lt Cdr Francks ainsi que le capitaine
Teynham furent acquittés. Par contre le Commandant D.Venables,
responsable des dragueurs de mines en Baie de Seine fut jugé
coupable de négligence et sévèrement puni pour les
55 morts du Hussar et 22 du Britomart.
LA
PLONGÉE
Aujourd’hui, le Hussar et le Britomart sont deux épaves peu plongées. La raison en est simple ; leur éloignement de la côte ne permet pas aux clubs n’ayant pas de dérogation 4 ème catégorie d’aller les explorer. Pour notre part, bénéficiant de moyens personnels, nous avons récemment plongé sur ces deux épaves.
Le HMS BRITOMART est entièrement retourné sur un fond allant de 35 à 40 mètres en fonction des coefficients de marée. Le sondeur détecte une masse de 6 mètres de haut qui se confirme au fond lorsque l’on est sur la quille en l’air de l’épave.
Des trous dans la coque permettent quelques incursions ça et là. C’est avec prudence qu’il faut manoeuvrer dans ce genre d’épave. La visite vers la proue confirme que cette dernière est cassée à environ 3/4 mètres de l’avant. Lorsque l’on revient sur la partie arrière, une grosse déchirure laisse apparaître ce qui fût vraisemblablement un impact de roquette ou d’obus. Les congres et les homards ont élu domicile sur cette épave, tout comme les ophiures, ces petites étoiles de mer qui tapissent la majorité du site
Le HMS HUSSAR, pour sa part, est couché sur bâbord. Sa position droite d’il y a quelques années n’est plus ! Son état de délabrement est très avancé. La violence de l’attaque fait que les structures de pont ne sont plus visibles. Les brèches ouvertes laissent apparaître les chaudières et la machinerie qui, à n’en pas douter, seront les derniers éléments qui resteront visibles dans quelques années.
(Croquis GRIEME -
Yvon Chartier)
REMARQUE
Le
GRIEME
remercie vivement un ami internaute qui s'est manifesté pour nous
signaler
l'inversion de texte sur la présente fiche du HMS HUSSAR & BRITOMART
par
rapport à notre ouvrage LA SAGA DES EPAVES DE
LA COTE D'ALBATRE
INFOS
PRATIQUES
Les coordonnées géodésiques
(Points G.P.S. EURO 50)
HMS HUSSAR 49°40’ 857 N et 00°05'960
W
HMS BRITOMART 49°40’ 260 N et
00°06’500 W
REPERES
BIBLIOGRAPHIQUES - DOCUMENTS - MAGAZINES
SAGA DES ÉPAVES
DE LA COTE D'ALBÂTRE
ÉPAVES
de Bertrand SCIBOZ