VILLE DE DIEPPE

 

 

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  • Nom : Ville de Dieppe

  • Type : Trois mâts barque

  • Nationalité : Française

  • Construction : Construit en tôle d’acier. Beaupré en acier et d’un seul morceau Les 3 mâts sont en acier et construits d’un seul jet jusqu’au mât de flèche. Les bases vergues et les vergues de hune sont aussi en acier. Les mâts de flèche et les autres vergues sont en pitchpin. Tout le gréement est en fer.

  • Propriétaires : Robbe fils de Dieppe pour 22/100 (armateur) Legal de Dieppe pour 22/100 Delarue de Dieppe pour 22/100 Mallet de Paris pour 25/100 Phocion Rossolin de Paris pour 6/100 Richard d’Orléans pour 3/100

  • Dimensions : Longueur 70 m    largeur 11,15 m    

  • Tonnage : 10769 tonneaux

  • Motorisation : Non renseigné

  • Coordonnées : Latitude : 45° 59'301 N, Longitude : 01° 52'531 O.

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La superbe histoire "oubliée" d'un trois-mâts barque dieppois, la fierté d'un navire emblématique de la cité de Jehan Ango
En collaboration avec la  Municipalité de Dieppe 

UN PEU D'HISTOIRE AVEC FREDERIC DAVID (Professeur d'histoire)



Rares sont les dieppois qui en ont connaissance, mais, à la fin du XIX ème siècle, Dieppe fut un temps un port pétrolier au moment même où l’importance de ce combustible se fit sentir. Encore plus rares sont ceux qui savent que le tout premier voilier pétrolier doté de cuves en vrac en France, fut un trois-mâts dieppois, le bien nommé Ville de Dieppe. Un voilier transportant du pétrole, ce n’est pas le moindre des paradoxes du Ville de Dieppe

Au moment même, où la construction navale française et le port de Dieppe connaissent quelques difficultés, en deux années, 1888 et 1889, le port de Dieppe lance un voilier unique, le Ville de Dieppe et un terre-neuvas, le Duquesne qui relance pour un temps l’activité morutière du port !

En 1888, l’armement Robbe de Dieppe a l’audace de faire construire ce trois-mâts barque aux chantiers de Southampton en Grande-Bretagne, alors que la marine à voile est moribonde. Non seulement, le Ville de Dieppe va donner des idées à d’autres armateurs en France, mais le bateau devient l’archétype de ces derniers voiliers : coque en acier, mâts, beaupré et vergues entièrement en acier. Le navire est le premier voilier à être équipé de cofferdams (cuves dans lesquelles on mettait le pétrole au lieu de simples barils).

Ce voilier est d’autant plus important dans "l’Histoire locale" que c’est un dieppois Monsieur Robbe et des capitaux dieppois pour l’essentiel qui vont être à l’origine de sa construction. Enfin, de nombreux membres d’équipage furent aussi d’authentiques dieppois dont les noms fleurent bon les patronymes locaux : Thoumyre, Delarue, Viandier, etc. Ce beau voilier, long de 80 m environ, hanta longtemps le port de Dieppe et après une carrière hors de commun, il finit par sombrer, sous les coups d’un sous-marin allemand en 1917 en Atlantique.

Propriétaires du Ville de Dieppe Quelques noms de marins qui ont navigué sur le Ville de Dieppe Dieppois Thoumyre Jules - Lieutenant (habitait 9 rue des Moines) Corrée Georges - Matelot Flouest Prosper - Mousse, novice puis matelot (habitait au 33 rue de la Lombardie) Viandier Joseph - Matelot léger Testulat Dominique - Maître au cabotage second Lemaréchal Fernand - Matelot Edet Jean-Baptiste - Matelot Edet Narcisse - Mousse (son fils) Rouennais Boutigny - Mécanicien Thierry Gustave - Mécanicien Blotière Marcel - Novice Jeantet André - Pilotin (disparu en mer !)

Fécampois Grangé Georges - Second-maître en cabotage

 

 

PREMIERES EMOTIONS

Article de l’Impartial du 16 novembre 1888

 

« 1888 a été marquée par un évènement qui mérite de prendre place dans les annales maritimes de notre cité.

Le grand et beau trois-mâts Ville de Dieppe a effectué son entrée dans notre port… On n’avait pas encore eu l’occasion de voir à Dieppe un navire de ce genre et l’on maugréait contre le mauvais temps qui l’empêchait de quitter la côte anglaise.
Il a pu enfin partir de l’île de Wight mercredi à 11h du matin. Il est arrivé hier vers deux heures du matin, en rade de Dieppe, remorqué par le remorqueur anglais Albert-Edward, capitaine Carell.

A 8 h du matin, il pénétrait dans la passe ; malgré l’heure matinale, un grand nombre de curieux étaient venus sur les jetés pour jouir du coup d’œil de l’entrée. Cette entrée s’est faite dans les meilleures conditions ; le Ville de Dieppe, malgré ses grandes dimensions, manœuvre admirablement. Grâce à ses excellentes qualités nautiques, ce navire, dirigé avec une rare habilité par le pilote Fournier, secondé par le pilote Giffard qui dirigeait le remorqueur, a exécuté ses différentes évolutions avec une précision et un sûreté qui font le plus grand honneur aux connaissances de ces hardis marins. Le grand trois-mâts a franchi très facilement les écluses de nos bassins et a été amarré à quai dans le bassin Bérigny en face du jardin de la sous-préfecture. Durant toute la journée d’hier, de nombreux curieux n’ont cessé de stationner sur le quai, le plus beau qu’on ait jamais vu à Dieppe ».

Le baptême du Ville de Dieppe, le 20 novembre 1888 fut l’occasion d’une fête importante à Dieppe. Plus de 200 invités vinrent saluer le voilier. Trois jours plus tard, le navire partit pour son premier voyage, en voici la relation par la Vigie (aujourd'hui les INFOS DIEPPOISES) de Dieppe.

23 novembre 1888

« Le trois-mâts Ville de Dieppe a effectué hier sa sortie pour son premier voyage. Cette sortie a eu pour notre ville l’importance d’un grand événement ; plusieurs milliers de personnes ont suivi pendant près de deux heures, les évolutions du beau navire.

Cette sortie présentait de grandes difficultés ; une forte brise soufflant de l’ouest ; des grains fréquents gênaient la manœuvre, mais grâce au vapeur anglais Gazelle, capitaine Rees, qui a donné obligeamment la remorque, tout s’est bien passé. Un grain assez violent s’est déclenché au moment où le navire était dans le chenal ; la mer qui était très grosse rendait difficile la tâche du remorqueur. A un certain moment, on a eu une vive appréhension, la remorque a choqué avec un bruit qui a fait croire qu’elle était rompue, mais il n’en était rien et le navire a repris son erre; il a établi ses voiles d’étai et débouqué des jetés sans accident. Les nombreux curieux ont pu admirer la magnifique allure du navire qui s’est éloigné majestueusement, à peine balancé par un léger tangage malgré l’état de la mer. ».

 

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 Les voyages du Ville de Dieppe...

 

Pour aller de Dieppe à Philadelphie (U.S.A.), on a pu relever de l’année 1890 à l’année 1894 un certain nombre de voyages, le plus rapide étant de 35 jours en 1890.

La majorité des voyages sont effectués entre 45 et 50 jours. Le plus lent s’est fait en 64 jours quand le Ville de Dieppe partit le 10 septembre 1894 pour arriver seulement le  13 novembre ! Il faut dire que cette traversée de l’Europe vers les Etats-Unis s’effectue contre les vents dominants. En revanche dans l’autre sens, les temps de traversées sont sensiblement plus rapides.

On note pour la même période une traversée de 24 jours en 1891, une autre de 28 jours, alors que la majorité des voyages se font en 30 jours environ. La traversée la plus longue a été de 38 jours dans ce sens en 1892. Il faut dire que le voilier n’était vraiment pas réputé pour sa rapidité, très large pour sa longueur, il ne pouvait prétendre rivaliser avec les quatre-mâts construits quelques années après lui dans les Chantiers français comme Saint-Nazaire ou Rouen


Ainsi, le Quevilly qui effectuait le même trajet de Rouen à Philadelphie à partir de 1897 se permit de faire une traversée ultra rapide en 12 jours seulement !

Pour les années 1901 et 1902, on s’aperçoit que les temps de traversées restent du même ordre : de 26 à 37 jours dans le sens Etats-Unis/Europe et de 36 à 67 jours de Dieppe à Philadelphie.

 

 LA FIN DU VILLE DE DIEPPE

 

Les explications du naufrage recueillies à La Pallice le 22 avril 1917

 

Le Ville de Dieppe est touché....

(Le Ville de Dieppe est touché)
Photo D.R. - Archives allemandes

 Le rapport est signé par le commandant H. Antonsen et le premier maître G.M. Gabrielsen.
Les autres membres de l’équipage ont pour noms :



Harry Andersen,
Jan H. Jensen,
Svend A. Jensen
Emil Olsen,  
Jens Pedersen
Finn Josephsen,
Paul Paulsen,
Norman Lagesen,
G. Meijer,
E. Nilsen,
Gerret Ruetering,
J. Shiseng,
M.J. Markussen
O. Nilsen.

 « Le samedi 21 avril 1917, le bateau a quitté La Pallice à 9 h 00 du matin.

Le vent venait du Nord-est, une petite brise soufflait et le commandant menait le bateau au mieux.

A midi, le bateau avait en vue le phare de Lasbolain par nord 1/4 ouest et le phare de Chasimon  par sud-est ¼ sud. Après cela, le bateau prit la direction de ouest 1/2 sud. 

Le vent était alors nord-nord ouest, la mer calme avec de légères risées du nord-ouest.

 Le Ville de Dieppe se couche, blessé à mort

(Le Ville de Dieppe se couche, blessé à mort)
Photo D.R. - Archives allemandes

 La fin du Ville de Dieppe est proche

(La fin du Ville de Dieppe est proche)
Photo D.R. - Archives allemandes

 

Le point était alors de N 46°05’ et de W 01°30’.

La direction jusqu’à 16 h 00 fut ouest ½ sud et la distance parcourue  de 14’, à 17 h 30 la distance parcourue était de 6’.

A ce moment un sous-marin a été observé dans l’axe de la poupe. Le sous-marin tira deux obus contre le bateau sans atteindre son but. Immédiatement, l’équipage se précipita aux deux canots de sauvetage.

Deux avions survolèrent le Ville de Dieppe en surveillant étroitement le sous-marin. Celui-ci, alors, plongea très rapidement. L’équipage décida alors de rester sur le bateau.

Après 7 ou 8 minutes, le sous-marin refit surface une fois que les avions s’en étaient allés et il tira à toute bordée sur le Ville de Dieppe et les canots de sauvetage. Mais, il ne parvint pas à atteindre les canots.

Après avoir tiré à peu près 20 coups contre le Ville de Dieppe, il changea de direction et partit vers 18 h 00 ce 21 avril.



C'était la fin du Ville de Dieppe qui disparut dans les flots de l'Atlantique.

La construction navale en 1888

En 1888, date de la construction du Ville de Dieppe, la construction navale civile est essentiellement portée sur des cargos mixtes, voile et vapeur. Cependant, les voiliers sont encore nombreux à être mis en chantier, du fait notamment que de nombreux ports dans le monde, ne possèdent pas encore d’infrastructures capables de ravitailler les navires en charbon, ni les chantiers aptes à effectuer des opérations de maintenance.

A cela, il faut ajouter le fait que le Ville de Dieppe est l’un des tout premiers navires de transport de pétrole en cuves. On imagine facilement que ce chargement hautement inflammable dissuade les armateurs de disposer des chaudières à proximité.

Enfin, à cette époque, nombreux sont encore les armateurs qui voyaient la propulsion vapeur d’un œil méfiant. Il faut des marins qualifiés, et donc chèrement rétribués, pour faire fonctionner les moteurs et chaudières, en plus de l’équipage dédié à la manipulation des voiles. Surtout, la présence de chaudières, de moteurs et d’une réserve de charbon amputent le bateau d’une partie de sa capacité de chargement. Le vent est gratuit et son utilisation laisse de la place pour les cales.

Enfin, les progrès accomplis au 19 siècle avec l’arrivée de clippers avaient permis  de réaliser des progrès et de lancer des voiliers atteignant des vitesses de 9 nœuds, ce qui était considérable pour l’époque. Ces progrès avaient bénéficié alors au transport de denrées telles que le café, le thé, mais aussi, les esclaves.

Si la présence de moteurs est ainsi parfois difficile à admettre pour les armateurs, ce n’est pas le cas des coques en acier. Les coques peuvent être plus longues, tout en gardant une certaine finesse. Ainsi, les voiliers en coque bois ne peuvent guère dépasser les 60 mètres.

Désormais les coques sont en acier puddlé, les assemblages sont faits avec des rivets. Avec cette technique, les coques peuvent avoir une forme droite, plus longue, plus résistante aux assauts de la houle. Les bateaux peuvent donc embarquer plus de chargement, tout en rendant inutile la présence d’un charpentier à bord.

C’est l’Angleterre qui règne en maitre dans la construction navale de ce type. On ne s’étonne donc pas de voir le Ville de Dieppe sortir des chantiers Oswald, Mordaunt & Co de Southhampton en 1888. Sa longueur est de 66 mètres pour une largeur de 11 mètres.

Il faut attendre  1893, avec la loi de relance de la marine marchande, sous la présidence de Sadi Carnot, pour voir la construction navale française adopter enfin ces principes. Dégressive dans le temps, la nouvelle prime était calculée sur la jauge brute et chaque millier de milles parcourus. Elle offrait 1,10 franc par tonneau pour les vapeurs, et 1,70 franc pour les voiliers construits en France. La différence de prime entre les vapeurs et les voiliers a incité les armateurs à construire de grands voiliers. Is seront affectés pour des transports lourds et pour la pèche au cap Horn.

Aussi le navire frère du Ville de Dieppe, le Quevilly, sortira en 1893, cette fois depuis un chantier français. Le Ville de Dieppe, construit en Angleterre, a coûté 600 000 francs. Le Quevilly, construit en France aurait couté 850 000 Francs sans cette loi.

On comprend mieux, à la lumière de ce contexte historique, pourquoi les premiers pétroliers étaient des navires à voile, ce qui peut représenter un paradoxe.

Durant la 1 guerre mondiale, c’est l’hécatombe pour ces voiliers. Ils très vulnérables face aux sous-marins allemands, mais ils sont appréciés car ils ne consomment pas de charbon, denrée stratégique.

En 1919, les lois sociales du 2 aout imposent une organisation des équipages en trois quarts de huit heures. Si cette organisation du travail était inscrite à l’ordre du jour de la conférence internationale du droit du travail maritime de Gênes en 1920, il n’y a pas eu de suites données et la France s’est retrouvée seule à adopter ce système de travail. Trop chère face à ses concurrents étrangers, la marine marchande française n’y a pas survécu.

Les premiers puits de pétrole en Pennsylvanie

puitsPensylvanie

 

Le pétrole et Dieppe

En cette fin de19ème siècle, on ne connait pas encore les multiples utilisations possibles du pétrole.

Depuis 1855, on sait distiller du pétrole pour en extraire du pétrole lampant qui sert alors pour l’éclairage, ainsi que du goudron, de l’essence, des solvants et des lubrifiants (l’essence est alors utilisée comme détachant). Le reste du distilla est …brûlé !

En 1859, un certain installe le premier forage. Il s’en suit une ruée vers l’or noir aux . Les seuls pays producteurs de pétrole sont la et les. Les gisements du sont alors inconnus. 

Rockfeller USA Philadelphie

Le pétrole arrivant à , à et à uen sert à alimenter des petites raffineries près de Douai, à Colombes et au Havre. Celles-ci alimentent la partie nord du territoire français. Pour la partie sud du pays, c’est le port de La Pallice qui concentre les rotations avec les USA.

 

Dieppe est alors un port en partie tourné vers le pétrole, où les liaisons avec Philadelphie ne sont assurées que par deux navires, le Ville de Dieppe et le Quevilly.

C’est la Compagnie Robbe & Fils qui possède alors le Ville de Dieppe.

Quais de Dieppe où accostaient les pétroliers Ville de Dieppe et Quevilly

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Le navire fait d’ailleurs la fierté de la ville, dont il porte le nom.
Il suffit pour cela de lire les journaux de l’époque pour s’en rendre compte.
Le journal L’Impartial du 16 novembre 1888 commente la première arrivée du navire en ces termes :

Le Ville de Dieppe à quai

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«A 8 h du matin, il pénétrait dans la passe ; malgré l’heure matinale, un grand nombre de curieux étaient venus sur les jetées pour jouir du coup d’œil de l’entrée. Cette entrée s’est faite dans les meilleures conditions ; le Ville de Dieppe, malgré ses grandes dimensions, manœuvre admirablement. Grâce à ses excellentes qualités nautiques, ce navire, dirigé avec une rare habilité par le pilote Fournier, secondé par le pilote Giffard qui dirigeait le remorqueur, a exécuté ses différentes évolutions avec une précision et une sûreté qui font le plus grand honneur aux connaissances de ces hardis marins»

Le baptême du Ville de Dieppe, le 20 novembre 1888 fut l’occasion d’une fête importante à Dieppe

Plus de 200 invités vinrent saluer le voilier. Trois jours plus tard, le navire partit pour son premier voyage, en voici la relation par la Vigie (aujourd'hui les INFOS DIEPPOISES) de Dieppe.

 «Le trois-mâts Ville de Dieppe a effectué hier sa sortie pour son premier voyage. Cette sortie a eu pour notre ville l’importance d’un grand événement ; plusieurs milliers de personnes ont suivi pendant près de deux heures, les évolutions du beau navire».

Le transport du pétrole en vrac.

Le est donc le premier pétrolier en cuve. Jusqu’alors, l’or noir était transporté en barils.

Pour les marins, cette nouvelle expérience est l’occasion de découvrir une nouvelle facette de leur métier.

Ils apprennent par exemple, à ne pas trop remplir les cuves. La température à est plus froide qu’à . Le pétrole est un produit qui se dilate en fonction de la température, et a donc tendance à avoir un volume plus important à , qu’à . Des cuves pleines à finissent donc par déborder à  ! L’équipage doit donc apprendre à gérer ce facteur.
Philadelphie

barilsQuai

Il doit aussi composer avec le ballant du liquide dans les cuves.


L’équipage apprend aussi à manipuler la chaudière de servitude avec grande prudence, toute flamme à bord pouvant être synonyme de catastrophe. D’ailleurs, l’explosion du pétrolier « Ville de Calais » en 1888 est là pour rappeler la dangerosité de ce genre de transport.

Pour aller de Dieppe à Philadelphie La majorité des voyages sont effectués entre 45 et 50 jours. Le plus lent s’est fait en 64 jours quand le Ville de Dieppe partit le 10 septembre 1894 pour arriver seulement le  13 novembre !

Il faut dire que cette traversée de l’Europe vers les Etats-Unis s’effectue contre les vents dominants. En revanche dans l’autre sens, les temps de traversées sont sensiblement plus rapides.

On note pour la même période une traversée de 24 jours en 1891, une autre de 28 jours, alors que la majorité des voyages se font en 30 jours environ.

La traversée la plus longue a été de 38 jours dans ce sens en 1892. Il faut dire que le voilier n’était vraiment pas réputé pour sa rapidité, très large pour sa longueur, il ne pouvait prétendre rivaliser avec les quatre-mâts construits quelques années après lui dans les Chantiers français comme Saint-Nazaire ou Rouen

A Philadelphie, le chargement du pétrole se faisait par gravité, par des cuves situées en hauteur par rapport aux cuves du navire. En revanche, à Rouen et à Dieppe, il fallait utiliser des pompes pour vider le navire, et l’opération prenait deux jours.

Une carrière sans incident jusqu’en 1917.

Jusqu’en 1902, le Ville de Dieppe assura la liaison entre Dieppe et Philadelphie. En 1902, l’armement Prentout Leblond, Leroux & Cie de Rouen prend possession à son tour du navire puis le revend en 1903 à la Compagnie Jens.


Flamme de l’armement Prentout

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 VIDEO AVEC LUDO 91 et ses compères Doumes, Svend et Stephane


 

 

 

Vendredi 24/06

 

C’est vers 19 h 00 que se sont retrouvés sur le port de la Côtinière les plongeurs du GRIEME et ceux de l’ADANAC pour préparer leurs plongées du week-end sur le Ville de Dieppe, ce trois-mâts barques coulé le 21 avril 1917 par le sous-marin allemand U.C. 21.


Rien ne manque, les trois bateaux prévus sont au rendez-vous, tout comme les 15 plongeurs devant participer à cette recherche. Il est décidé de fixer le rendez-vous à 5 h 00 demain matin pour embarquer le matériel et le départ aura lieu vers 6 h.

Plusieurs heures de navigation étant nécessaire pour atteindre le point G.P.S. communiqué par la Marine Nationale suite à son investigation qu'elle a menée sur cette épave en 1998.

Les taches sont réparties, et chacun sait ce qu’il aura à faire le lendemain.

 

 

(Dessin de base de travail réalisé
par Michel TORCHE)

 

 

 

 

 

Samedi 25/06


L’OCTOPLUS, bateau base de l’expédition accoste à 5 h comme prévu pour embarquer toute la logistique lourde : blocs de plongées, blocs de décompression pour les paliers, mouillage de secours, oxygène, caméra, appareils photos, locos plongeurs. Rien ne manque. L’Estéou de « Loulou » est aussi là pour embarquer 4 personnes. Le "Zodiac" d’Objectif Mer assurera la sécurité surface sur la zone. Il est 5 h 45 lorsque nous quittons le port de la Côtinière, cap au 270°.

Arrivé sur zone après 4 heures de navigation sur une mer calme, ce sont les orages qui nous accueillent. Deux lignes de palangres ceinturent ce qui nous semble être la zone de l’épave. La confirmation en est donné lorsque après un premier passage, l’écho du Ville de Dieppe est vu au sondeur. Une épave est bien là, des structures de 4 m de haut sont mesurées au sondeur et la longueur reste à déterminer. En apparence surface, il n’y a pas trop de courant. Il est donc décidé de lancer un premier mouillage pour tenter d’accrocher l’épave et assurer donc ainsi «une ligne de vie» entre la surface et l’épave. Une fois positionnée, cette ligne de vie, comme son nom l’indique, fera le lien entre le bateau et les -52 m que représentent la profondeur à laquelle gît le Ville de Dieppe.

Une première palanquée composée de 2 plongeurs de l’ADANAC a pour mission d’assurer ce mouillage pour que les 6 autres palanquées puissent descendre avec certitude sur l’épave. Le courant très fort par -52 m et la visibilité restreinte à 4/5 m auront raison des 2 plongeurs qui apercevront le Ville de Dieppe sans jamais pouvoir l’atteindre. Une température de l’eau n’excédant pas les 11/12°alliée à un fort courant fera renoncer ce premier groupe. On remonte donc le mouillage qui est tombé à quelques mètres de l’épave, et pour la deuxième fois, un groupe de 2 plongeurs du GRIEME descend pour tenter d’accrocher l’épave. Ils sont équipés d’un des locos-plongeur pour leur permettre de contrer le courant et donc d’approcher l’épave au plus prêt si le mouillage est encore à côté.

 

 

 

(Ci-contre - Source photographique - Roland CAIVEAU)

 

Cinq minutes passent, et ne voyant pas revenir ces deux plongeurs, il est décidé de "mettre à l’eau" Patrice notre photographe que j’accompagne pour la sécurité et le repérage de l’épave. Arrivé à –42/-43 m, le courant toujours présent, la visibilité réduite pour faire de la photo et la température de l’eau nous dissuadent. Il nous faut remonter pour prévenir des mauvaises conditions et de ce fait prendre une décision. Nous croisons sur notre remontée une autre palanquée, Jean Pierre et Patrick, qui comme nous, étaient prêts se sont mis à l’eau. Ils iront jusqu'à – 52 m, apercevront l’épave, mais la ligne de vie étant à 5 m de cette dernière et dérivant au courant, ils décideront de remonter aussitôt.

Hélène et Fred qui étaient descendus les premiers n’ont pas croisés notre route. Ils ont du remonter en pleine eau. C’est ce que nous supposons avec Patrice après être remontés et cela se confirme. Nos deux amies sont en dérive avec un parachute de palier et sont suivis par Lionel et le Zodiac qui assure leur sécurité. Une fois remontés à bord comme Patrice et moi, Hélène et Fred nous confirment avoir vu l’épave. Le courant les ayant empêché de mettre le mouillage sur cette dernière, ils se sont aidés du scooter sous-marin pour aller sur le Ville de Dieppe afin de tenter de l'explorer, mais n’ont pas réussit à revenir sur la ligne de vie du fait d'un courant trop important, d'une visibilité réduite et surtout d'un temps de paliers trop long pour continuer à chercher cette ligne qui les aurait ramenés à la surface, mais peut être à court d’air ! Les bouteilles de sécurité étant sur la ligne de vie, ils ont préféré remonter en pleine eau avec une autonomie suffisante pour faire les paliers en toute sécurité. La décision est donc prise d’arrêter l’investigation. L’heure de la "renverse de courant" étant trop proche, force est de constater que le Ville de Dieppe tient à garder encore son secret. Néanmoins, les observations faites par Hélène et Fred nous permettent de corriger quelque peu le dessin que nous avions fait à partir de l’image SONAR que le chasseur de mines CAPRICORNE avait réalisé en 1998.


Sur le chemin du retour, il est décidé de plonger sur une épave proche de la côte par –22 m pour apaiser un peu la désillusion de cette matinée au large.

Une épave de cargo datant de la première guerre nous est proposée par nos amis de l’ADANAC. Epave pour laquelle l’identité reste aussi un mystère. Les conditions de plongée à la côte étant-elles aussi réduites à 4/5 m de visibilité et à une température d’eau à 18° en surface et 11° au fond.

Il est 19 h 00 lorsque nous atteignons le port. Après avoir débarqué notre matériel, un débriefing est organisé au local de nos amis Oléronnais. Les avis sont partagés quant à un retour possible le dimanche sur le Ville de Dieppe. Les conditions « de fond » n’évoluent pas aussi rapidement que cela en Atlantique !

La visibilité en cette année 2005 est vraiment mauvaise depuis une quinzaine de jours. Nos amis, en prospection depuis 3 semaines maintenant, nous le confirment. La température de 11/12° rencontrée à cette époque est, elle aussi, inhabituelle. Alors il est décidé d’annuler la journée de dimanche au large. Sachant que l’épave est bien présente là où nous l’avait positionné la Marine Nationale, nous attendrons des conditions plus propices pour replonger sur celle-ci et atteindre notre objectif, "faire du film" et de l’image photographiques, prendre les mesures de l'épave afin de raconter dans le détail, la fin du Ville de Dieppe.

 

 

Le Ville de Dieppe croqué par Hervé MARSAUD

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

La Municipalité de Dieppe
La Marine Nationale (Plongeurs du chasseur de mines Le Capricorne)
Restaurant Le Festival (Dieppe)
L'ADANAC
Objectif Mer
Patrice STRAZZERA
Hervé MARSAUD
Pascal HENAFF et Roland CAIVEAU

Doumes, Svend, Stephane et Ludo 91
(Wet and Wild Production)