LOUISIANE

Le Navire
Le Navire / La Compagnie
Le Contexte
Naufrage
La Plongée

  • Nom : Louisiane

  • Type : Cargo mixte en acier - 4 cales

  • Nationalité : Française

  • Construction : Ateliers de France - Dunkerque 25 fevrier 1905r

  • Propriétaire : Compagnie Générale Transatlantique

  • Dimensions : Longueur 116,70 m Largeur 14,46 m Tirant d'eau - Tirant d'air 7,95 m  

  • Tonnage : Tonnage brut/net 5.109/3.304 tonneaux

  • Motorisation : Machine -  A pilon - Triple expansion 1 hélice diam. 5,26 mètres

  • Vitesse : 12,5 noeuds environ

  • Cargaison :  Coton – produits métallurgiques – farine - huile Passagers Aucun (18 max. en 9 cabines de 1ere Cl. de 2 personnes)

  • Naufrage :  9 mars 1916 Circonstances naufrage Torpillé par sous marin allemand U.B. 18

  • Coordonnées géodésiques : Latitude : 49° 27’ 070 N, Longitude : 0° 01’ 480 E.  Profondeur de l'épave  Entre 25 et 30 m

  • Autres: Commandant Maurice Lepretre Equipage 66 personnes

 Le Louisiane, cargo de la C.G.T. (Compagnie Générale Transatlantique)
Une des premières victimes de l'as allemand OTTO STEINBRICK

 LE LOUISIANE DE LA C.G.T.

Compagnie mythique française au même titre que les Messageries Maritimes, la Compagnie Générale Transatlantique développe autant son activité dans le transport de passagers que de fret. La C.G.T passe donc commande aux chantiers A.C.F de Dunkerque d’un cargo de 116 mètres de long de la série dite "Californie".

EIle part pour son premier voyage le 2 juillet 1905 à destination de New York, La ligne transatlantique étant alors en plein essor.

Propulsée par une machine triple expansion de 2.400 chevaux construite par les ateliers havrais Caillard et Cie, la Louisiane est affectée ultérieurement à la ligne du Golfe qui dessert Cuba, le Mexique et la Nouvelle-Orléans. L’état de Louisiane est alors un des premiers exportateurs de coton et Le Havre s’impose comme grand port cotonnier français. Le fret en sortie de Cuba (sucre, rhum) est aussi abondant et débarquait jusqu'alors à Anvers.

C’est au cours d’une de ses rotations que le Louisiane connaît une infortune de mer dans cette zone très sensible aux cyclones. Alors qu’il se trouve à 50 milles de Key West, il talonne un récif le 21 octobre 1910 en étant pris dans la traîne d’un ouragan. Les passagers sont transbordés sains et saufs sur le cargo Texas tandis que des opérations de renflouement remettent le navire à flot en février 1911. Fort heureusement, le Louisiane ne subit que des avaries mineures suite à cet échouage.

La Louisiane ne se cantonne pas simplement à cette ligne du Golfe puisque la Compagnie Générale Transatlantique l’utilise à plusieurs reprises pour effectuer des relèves d’équipage de Terre-neuvas entre Saint-Malo et Saint-Pierre-et-Miquelon. En amenant directement les marins sur place, les armateurs des pêcheries économisent le temps de trajet à leurs morutiers qui peuvent ainsi rester sur zone plus longtemps et être plus rentables.

Pendant la guerre, les polices d’assurance pour risques de guerre souscrite par la C.G.T auprès du courtier parisien Edouard Audra permettent d’avoir une idée des voyages du Louisiane :

        - Police 99237 du 21 mai 1915           Les Canaries/La Havane/Nouvelle Orléans/Le Havre pour un départ le 25 mai 1915.
        - Police 102290 du 26 octobre 1915   Buenos Aires/Dakar/Bordeaux départ 31/10/1915.


 L'AS DE LA FLOTTILLE DES FLANDRESOtto Steinbrick

Otto Steinbrick né en 1888, rejoint la marine du Kaiser le 3 mars 1907. En 1911, il se spécialise dans une arme nouvelle : les torpilles. Il rentre tout naturellement dans une nouvelle branche de la marine impériale alors en pleine expansion : les sous-marins.

A la déclaration de la guerre, Steinbrick est second capitaine à bord du U.6. Versé le 15 mars 1915 à la flottille des Flandres, il obtient son premier commandement le 12 janvier 1916 avec le U.B.18. En moins d’un an, il devient le meilleur chasseur de la flottille en coulant pas moins de 73 navires totalisant 74.781 tonneaux ainsi que le sous-marin britannique E.22.

Il finit la guerre avec 231.614 tonneaux à son actif, un croiseur et un sous-marin devenant ainsi le pendant en Manche du redoutable as des as allemands Arnaud de la Periere qui devait couler 454.000 tonneaux en Méditerranée. Ce chiffre est d’autant plus impressionnant que les conditions de combat en Manche sont beaucoup plus dures qu’en Méditerranée.

Il devait survivre à la 1 ère guerre mondiale et ne décéder en prison qu’en 1949 après y avoir été emprisonné par les anglais à cause de son titre honorifique de S.S donné par les Nazis pour ses états de service.

 

LA RADE DU HAVRE : TERRAIN DE CHASSE DES U-BOAT

Le port du Havre en 1916

 

 

 

Avec la stabilisation du front terrestre, la guerre n’est plus qu’une succession d’offensives inutiles ou les gains territoriaux ne se limitent qu’à quelques centaines de mètres bien souvent repris des le lendemain. Par contre, les besoins logistiques sont énormes pour alimenter une économie de guerre : besoins énergétiques (charbon, huile), matières premières (acier, bois, coton …) alimentaires que matériel militaire.

Les ports revêtent donc une importance stratégique et devant l’immobilisme du front terrestre, les généraux des deux cotés voient dans la mer le moyen de leur victoire : au blocus des cotes allemandes par la Royal Navy répond la guerre sous-marine à outrance des allemands.

L’estuaire de Seine devient donc très rapidement le terrain de chasse des sous-marins allemands car c’est le point de passage obligé des navires se rendant au Havre ou à Rouen. Les U.boats guettaient en Manche les charbonniers en provenance de Cardiff et les grands cargos en provenance d’Amérique du Nord.

U.Boat tapi au fond de la mer

Les sous-mariniers allemands sont aidés dans leur tache par la quasi absence de tout moyen de lutte et de détection anti-sous-marines.  Aussi, ils peuvent arraisonner en toute impunité en surface les cargos qui ne naviguent en convoi et escortés qu’à partir de 1917. Ils sont donc des cibles faciles.

L’apparition des sous-marins en Manche et sur rade du Havre constituent d’autant une surprise pour les Alliés que ceux-ci pensent que la faible profondeur des eaux privent les sous-marins de leur principal avantage : la navigation en immersion. Néanmoins, la valeur et l’agressivité des commandants allemands permettent de contourner cet obstacle. Ils ont aussi une parfaite connaissance de la rade pour y avoir naviguer pour certains en temps de paix en tant qu’officiers à bord de navires de commerce allemands.

Ainsi, Steinbrick connaît bien la rade du Havre pour y avoir effectuer des escales à bord de paquebots. Ils font même de la faible profondeur de la rade un avantage en s’y posant sur le fonds pour guetter leurs proies ou pour y mouiller des mines à orins.

 

 LA PREMIERE CROISIERE DU U.B. 18

En février 1916, les chantiers allemands Blohm und Voss d’Hambourg lancent une nouvelle série de sous-marins côtiers améliorés – les UB II -.Croquis de l'AU REVOIR réalisé par Michel TORCHE/GRIEME

 ( U.boat de type UB II - © www.uboat.net)  



Partant la nuit du 26, l’ U.B.18 passe sans encombre le détroit de Douvres et commence sa moisson de navires alliés : les dragueurs Au Revoir et Iles Chanzey les 27 & 28, le 8 mars le cargo Harmatis (6.387 tonnes) au large de Boulogne. Il revient sur Le Havre ou il coule le Louisiane le 9 au soir profitant de la nuit pour se faufiler entre les navires en attente sur rade n°1.

 

LE DERNIER DEPART

Le 9 février 1916, le Louisiane, après un arrêt à Newport News, lance ses amarres de la Nouvelle-Orléans pour ce qui devait être son dernier voyage. Il a chargé au cours de sa rotation 2.449 balles de coton, 17.139 barres d’acier, 1.140 rouleaux de fil de fer barbelé, 17.632 sacs de farine, 900 barils d’huile.

Le 6 mars 1916, il est 23 h 30 lorsque le cargo de la C.G.T se présente en rade du Havre pour prendre ses instructions d’engainement du chenal. Malheureusement, aucun poste à quai n’est disponible, des transports anglais étant occupés à décharger des troupes et du matériel.

Aussi, le Louisiane est mis à un poste d’attente et le 07 mars au matin, il reçoit ordre de se positionner dans l’alignement entre la bouée A2 et le feu à éclats de La Hève.

Le 9 mars, des renseignements en provenance de l’intelligence militaire parviennent à la préfecture maritime de Cherbourg du départ de 2 sous-marins allemands des bases belges pour se positionner aux abords des ports du Havre et de Brest. L’information parvient à 20 h 00 dans le bureau de l’amiral gouverneur de la place du Havre et une heure plus tard, il est décidé de faire rentrer tous les navires dans les bassins ou en Seine pour les protéger. A 22 h 00, au moment ou l’arraisonneur Antoinette quitte le quai pour faire entrer le Louisiane, une déflagration se fait entendre : le cargo de la C.G.T vient d’être torpillé !

 

LA FIN DU LOUISIANE

Le U.B.18, de retour sur la rade du Havre, a profité de l’obscurité pour se rapprocher au plus prêt des navires mouillés afin de s’assurer que ses torpilles fassent mouche du premier coup.

Le Louisiane est torpillé
Alors que le commandant Lepretre vient de finir son quart et part se coucher, une explosion secoue le bord : une déflagration vient d’arriver au niveau de la cale 3. Les dégâts sont importants : l’hélice est arrache par le souffle de l’impact, une brèche de 3,50 mètres laisse pénétrer l’eau dans les bas fonds du navire sans qu’il soit possible de l’étayer.

L’eau rejoint bientôt la salle des machines et provoque l’explosion des chaudières : on ne devait plus revoir le troisième mécanicien Pellerin qui veillait sur les feux. C’est d’ailleurs la seule victime de ce torpillage.

Le commandant réussi à rassembler le reste des membres d’équipage (65) sur le pont et à les faire évacuer. Le Louisiane met moins de 15 minutes à couler droit, les mats, la cheminée, sa passerelle émergeant encore car le navire repose sur  un fonds de 10 mètres. Lepretre devait d’ailleurs en profiter pour rejoindre le lendemain son bâtiment pour y récupérer le journal de bord et quelques effets.

Le Louisiane est le premier navire perdu par la C.G.T lors de la 1ère guerre mondiale, la compagnie perdant un total de 124.000 tonneaux soit le tiers de ce qu’elle avait en 1914.

Otto Steinbrick, son forfait accompli, devait en profiter pour couler le Silius, 3 mats barque mouillé à 500 mètres du Louisiane ! Bien que de nationalité norvégienne et appartenant donc à une nation ayant fait acte de neutralité, le Silius,  comme tout navire neutre, présent dans les eaux territoriales françaises ou anglaises, est considéré  par les allemands comme participant à l’effort de guerre allié et donc susceptible d’être coulé sans sommation.  Ce double torpillage provoque la fureur de la population havraise et les journaux se déchaînent contre cet acte assimilé à de la piraterie.

Les autorités militaires françaises doivent aussi réviser leurs opinions à propos de la guerre sous-marine et de la fausse protection par la faible profondeur de la rade du Havre. Des filets sont donc posés des avril 1916 pour protéger une zone sur rade. Ce barrage prouve sont efficacité en capturant le 21 un sister-ship du U.B.18 : le U.B.26 Celui-ci est renfloué et remis en service sous les couleurs françaises sous le nom de Roland Morillot (sous-marinier français qui s’est illustré en mer Adriatique sur le Monge a bord duquel il a sombré après avoir réussi à sauver son équipage).

LE LOUISIANE AUJOURD'HUI - PLONGEE

Le Louisiane repose dans des fonds à la sortie de l’estuaire de Seine : faible profondeur, alluvions, marnage et marée, tout contribue a ce que la visibilité soit extrêmement mauvaise dans ces parages.


Aussi, cette épave n’est, à notre connaissance, pas ou très peu plongée. De plus, présentant un danger pour la navigation, il est très vraisemblable qu’elle ait été rasée après la 1ère Guerre Mondiale.

 

REMERCIEMENTS

L’association French lines et particulièrement Gaëtan Crespel pour les documents fournis.  

 POUR EN SAVOIR PLUS... DEUX SITES A VISITER

La French Line U.Boat.net

Retrouvez également le "LOUISIANE" dans "La Saga des Epaves de la Côte d'Albâtre", édité par le GRIEME en vente par correspondance sur notre site internet.