RUBIS
- Nom : Rubis
- Type : Sous-marin
- Nationalité : Française
- Construction : Chantiers navals Toulon - France Date de lancement 30 Septembre 1931
- Propriétaire : Marine Nationale française
- Dimensions : Longueur 66 m Largeur 7,12 m Creux 4,90 m
- Tonnage : 762 tonnes
- Motorisation : 2 moteurs diesel VICKERS-ARMSTRONG + 2 moteurs électriques SCHNEIDER Puissance 650 Cv/500 Cv selon moteur
- Vitesse : Vitesse 12/9 nœuds selon moteur
- Armement : Un canon de 75 et 2 mitrailleuses de 13 mm.
Dans ses puits, réparties dans 16 mouilleurs (8 de chaque côté), 32 mines de 1090 kilos contenant une charge explosive de 320 kilos. - Naufrage : (volontaire) 31 janvier 1958 au large du cap Camarat Cause du naufrage Charge explosive
- Coordonnées géodésiques : Non Renseigné
- Autres: Equipage 45 hommes dont 4 officiers - 9 sous officiers - 32 hommes d’équipage
LE RUBIS Une pierre précieuse sous des mètres cubes d'eau salée Par Dominique RESSE Qui s'est approché du GRIEME en 2007 au point d'en devenir membre officiel le 28 décembre 2007 (Page avec séquence vidéo sous-marine haut débit hautement recommandé) Mise à jour 02-Avr-2009 20:45 (Le RUBIS - Avec l'aimable autorisation des Editions Marius-Bar/Toulon)
PREAMBULE
C’est la deuxième immersion que je fais sur l’épave du RUBIS. La première fois, il y a quelques années, c’était derrière une gueuse en plomb de 8 kilos. «Accrocheur » dans un club Varois, je devais amarrer la bouée à laquelle le "patron" du bateau support de plongée allait s’accrocher avant d’autoriser le départ de ses palanquées.
Tout à ma mission, descendre le plus vite possible, trouver un endroit résistant pour faire mes deux tours morts et mes deux demi-clés, et rapidement remonter afin de faire-part de mes constatations, à savoir : visibilité, vitesse du courant…etc., je dois reconnaître que le RUBIS m’avait laissé un amer goût de «trop peu» !
Le temps est passé, cette expérience ne s’est pas renouvelée et j’ai un peu oublié la vision fugitive que j’avais eue de cette épave.
Aujourd’hui, 11 juin 2007, sous un soleil radieux, sur une mer d’huile je savoure à l’avance l’idée que je vais avoir tout mon temps pour le détailler…enfin… «tout mon temps !». Le sondeur indique quand même 38 mètres ! C’est tout au plus 20 minutes «raisonnables» que mon ordinateur va m’accorder sur cet écho haut de près de 8 mètres qui se dessine sur l’écran.
Je dois, comme sur l’Espingole, photographier l’avant de l’épave. Mais Yvon me rassure " 4 ou 5 clichés et après quartier libre ! ". De toute façon, François mon fidèle binôme doit balayer le dessus du RUBIS avec sa caméra, je n’aurai qu’à le suivre !
Au cours des mois qui ont précédé cette «semaine épaves», j’ai eu tout loisir pour me documenter sur les épaves que nous avions retenues et je me suis particulièrement attardé sur le RUBIS. Internet et les innombrables sites dans lesquels ce sous-marin est évoqué, ma manie de découper, classer et conserver les articles parus dans les revues de plongée, les quelques livres spécialisés sur les sous-marins… des sources d’informations ne manquent pas !
J’ai ainsi découvert la plus fabuleuse et glorieuse histoire qu’un navire de la Marine Française puisse espérer !
Alors plongeons avec le GRIEME dans la superbe aventure du RUBIS.
Dominique RESSE
LA FAMILLE
L'histoire commence en Janvier 1928. Le RUBIS est mis en chantier à TOULON. Il sera un sous-marin mouilleur de mines de la série SAPHIR. Cette série en comptera six et tous (sauf 1) porteur d’un nom de pierre précieuse.
Le SAPHIR (mis en service 1930) Le TURQUOISE (mis en service en 1930) Le NAUTILUS (mis en service en 1931) Le RUBIS (mis en service en 1932) Le DIAMANT (mis en service en 1933) et le PERLE (mis en service en 1937)
Article sur les sous-marins de la série des pierres précieuse - A lire
Le NAUTILUS, 3ème de la série, le seul dont le nom n’évoque pas la joaillerie, s’est vu attribué le nom du célèbre submersible du capitaine NEMO en hommage à Jules VERNE dont l’année 1928, centième anniversaire de la naissance du romancier, coïncide avec la mise en chantier de ce sous-marin.
Le lancement du RUBIS a lieu le 30 septembre 1931. Le bâtiment est officiellement inscrit en tant que bâtiment en service actif en avril 1933. Il est basé à Toulon.
Le RUBIS pesait 762 tonnes pour une longueur de 66 mètres et une largeur de 7,12 mètres. Sa coque principale avait un diamètre approximativement de 3 mètres. Une coque plus légère contenait les ballasts, les puits de mines et les appareils de plongée. Son tirant d’eau était de 4,90 mètres, et une profondeur de 9 mètres était nécessaire pour que, quille sur la vase, le point le plus haut de son kiosque devienne invisible de la surface. Sa profondeur maximum d’immersion était de 80 mètres.
En navigation de surface, ce sont 2 moteurs diesel fabriqués par les chantiers NORMANDS au Havre sous licence VICKERS-ARMSTRONG qui , grâce à leurs 6 cylindres donnant pour chacun 650 CV à 360t/mn, entraînent le RUBIS à une vitesse de 12 nœuds. En immersion, le relais est pris par 2 moteurs électriques SCHNEIDER de 500 CV chacun et qui lui confère la vitesse de 9 nœuds.
Son armement est constitué d’un canon de 75 et de 2 mitrailleuses de 13 mm. Dans ses puits, réparties dans 16 mouilleurs (8 de chaque côté), 32 mines de 1090 kilos contenant une charge explosive de 320 kilos.
Mouilleur de mines, certes, mais cette fonction n’empêche pas le RUBIS d’attaquer aussi à la torpille, et pour ce faire, il embarque 3 torpilles de 550 mm et deux torpilles rapides de 400 mm.
Le fonctionnement du navire est assuré par un équipage de 45 hommes dont 4 officiers, 9 sous-officiers et 32 hommes d’équipage.
Et l’histoire peut commencer ! Une histoire si riche que c’est un site entier qui pourrait être consacré à la vie du RUBIS. Voici quelques faits marquants, quelques faits de guerre particulièrement héroïques à mettre au crédit de ce sous-marin français.
L'histoire commence donc à TOULON où les sous-marins mouilleurs de mines sont normalement basés. La Méditerranée pensait-on dans les états majors, devant être le principal théâtre de toute guerre future.
Mais, dans le but d’élargir le cercle des opérations et afin de familiariser ses submersibles avec d’autres océans, ceux-ci, en 1936 transfèrent le Saphir, le Nautilus, le Turquoise et le RUBIS à Cherbourg. Le but : être opérationnel en Manche et en Atlantique. Le RUBIS est alors sous le commandement du Lieutenant deVaisseau Georges CABANIER (de 1938 à 1941)
Durant 3 années, c’est au large de St Vaast la Hougue, dans la zone de Ouistreham, le long des côtes anglaise, et même jusqu’en Mer du Nord ou devant la rade de Brest que le RUBIS s’entraîne aux opérations de mouillage de mines, rendues délicates du fait du courant, des marées ou des conditions météo souvent peu clémentes.
En mai 1939, la guerre semble proche et inévitable. Le RUBIS reçoit l’ordre de regagner la Méditerranée. C’est donc sans regret que l’équipage quitte les brumes de La Manche pour le soleil du sud et se retrouve en Tunisie, à Bizerte. Néanmoins, les exercices se succèdent comme par exemple cette plongée expérimentale à – 80 mètres, profondeur maximale que les capacités du sous-marin permettent d’atteindre.
La France entre en guerre le 3 septembre 1939. Le conflit surprend le RUBIS en pleine révision. Sitôt opérationnel, en janvier 1940, il est affecté au port de Brest, ainsi que le Saphir et le Nautilus dans le but d’apporter de l’aide à la Finlande. Mais à l’arrivée dans leur nouvelle base, la Finlande vient tout juste de capituler.
Les évènements se précipitent, et au moment où l’Angleterre demande à la France des sous-marins mouilleurs de mines dont elle manque cruellement, l’Italie entre en guerre (vers le 10 juin). Décision est alors prise de faire revenir à Bizerte le Nautilus et le Saphir tandis que le RUBIS navigue vers la Grande-Bretagne où il arrivera en mai 1940 et sera le premier bâtiment français à être mis à disposition de l’amirauté anglaise dans le port de Harwich, sur la côte Est de l’Angleterre. Cependant, la base du RUBIS sera à Dundee. Commencent alors 5 années durant lesquelles le RUBIS ne reverra pas la France !
Hitler a envahi la Norvège et le Danemark en avril 1940, et c’est pour ces destinations que le RUBIS reçoit ses premiers ordres.
1ère mission : Départ le 3 mai, direction Egersund en Norvège….objectif : le mouillage de 32 mines… retour le 14 mai….résultat : 2 navires de commerce coulés et un cargo de 2435 tonnes endommagé.
2ème mission : du 23 au 30 mai…mines mouillées devant le fjord de Haugesund en Norvège… résultat : un chaland (174 t) et un cargo (938 t) coulés.
3ème mission : du 5 au 12 juin …mouillage des mines au nord de Bergen en Norvège… un contre-torpilleur allemand le localise et l’oblige à s’immobiliser en immersion durant 30 heures……sans conséquence…résultat un cargo (1081t) coulé.
Mais les nouvelles de France dont l’équipage a écho à chaque retour à sa base empirent de jours en jours. C’est la déroute et la France rappelle tous ses sous-marins ainsi que le navire ravitailleur Jules Verne.
L’amirauté anglaise sollicite le RUBIS pour une dernière mission de la plus haute importance… miner l’intérieur du fjord de Trondheim en Norvège. L’amirauté française accepte à la condition que le navire soit rappelé si l’armistice avec l’Allemagne était signée.
4ème mission : appareillage le 20 juin…..mines mouillées le 26… Passage sous un contre-torpilleur sans être détecté… résultat : un chasseur de mines allemand (356 t) coulé.
Mais l’armistice a été signé le 22 juin avec l’Allemagne et prend effet le 25. Bizarrement, le RUBIS suite à des difficultés de communication n’est pas informé de la situation. A son retour en Angleterre, le RUBIS est immobilisé et attend les ordres. Les accords d’armistice prévoient la cessation d'hostilité et de désarmement des navires de la France. Pour exclure le risque de vovir un jour la flotte française utilisée contre le Royaume-Uni et montrer à celui-ci comme au monde sa résolution, Winston Churchill lance l'opération CATAPULT
Dans la nuit du 2 au 3 juillet en usant de ruses diverses, la Royal Navy se saisit par la force des navires français présents dans les port anglais, dont les équipages sont internés dans des camps de la région de Liverpool.
Au total, huit torpilleurs, quatre sous-marins, dix avisos et plus d'une centaine bâtiments légers représentant plus de 12.000 hommes sont aux mains des anglais. Navires occupés, équipages sur les quais, le choix est simple : se rallier au FNFL (Forces Navales Françaises Libres) commandées par l’amiral MUSELIER ou le retour en France. (A lire également sur notre site, l'article sur La Combattante, destroyer d'exception ayant appartenu aux FNFL)
Ci contre (à droite) l'Amiral MUSELIER Site france-libre.net
DATES - FAITS & CHIFFRES REMARQUABLES POUR LE RUBIS
4 opérations avant l'armistice Saisi par la Royal Navy à Dundee le 3 juillet 1940, puis réarmé F.N.F.L. 22 missions jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale 15 navires coulés sur ses mines dont treize identifiés formellement - Voir liste ci-dessous : BLAMMARREN le 28/05/1940 - 174 t/Norvégien JADARLAND 31/05/1940 - 938 t/Norvégien SVERRE SIGURDSON le 10/06/1940 - 1081 t/Norvégien UJ-D le 07/07/1940 Un navire coulé à la torpille HOGLAND le 21/08/1941 - 4360 t/Finlandais Patrouilleur V-406 le 18/08/1942 UJ-1403 le 22/10/1943 KNUTE NELSON - CLARKE HUGO STINNES et UJ-1715 le 27/09/1944 WEICHESELLAND 3654 t - UJ-1113 - UJ-1116 - Dragueur R.402 en décembre 1944 Indisponible à Dundee après janvier 1945 Condamné le 10 avril 1949
DES HOMMES D'EXCEPTION
Les 3000 marins et 22 officiers qui se seront joints au Général De Gaulle fin 1940, seront environ 10.000 en 1943 grâce à l’arrivée d’hommes les ayant rejoints d'un peu partout par les moyens les plus divers, dont des départs de France occupée, par mer à la barbe des allemands.
Pour sa part, le RUBIS est saisi à Dundee le 3 juillet 1940. La prévenance de l’amirauté anglaise associée au désir de résister et combattre de l’équipage (1 officier, 1 sous-officier et 3 marins seulement décident de rentrer en France !) font que le RUBIS avec la Junon, la Surcouf et la Minerve seront les premiers sous-marins de la France Libre.
Le RUBIS est disponible dès septembre 1940, mais les mines françaises Sauter-Harlé ne sont plus disponibles. Il est décidé que le sous-marin sera affecté à des missions d’attaque. Il effectue ainsi 4 opérations : la 5ème (5 au 20 septembre 1940) aux alentours de Dogger Bank par mauvais temps, la 6ème en octobre à l’entrée de Stavanger, la 7ème en novembre durant laquelle il débarque en Norvège un agent de renseignement, et la 8 ème (1er au 18 décembre 1940) consistant en une mission de surveillance sur les cotes d’Utvaer. Mais, trop lourd, trop lent il déçoit, n’obtenant aucun résultat.… il sera transformé afin de pouvoir être équipé de mines anglaises Vickers Armstrong et retrouver sa fonction première : mouilleur de mines.
Le 7 mai 1941, le RUBIS est au large de Dundee en essai. Trois jours après, une cérémonie officialise le changement de "Pacha"…le lieutenant de vaisseau Rousselot prend le commandement en remplacement de Cabanier, promu capitaine de corvette, qui va être envoyé dans le Pacifique.
La 9ème mission, (1er au 15 juin 1941) dans le Golfe de Gascogne donna des sueurs froides à tout l’équipage. Le 8 juin, après avoir fait surface, la barre se bloque 15° à droite. Obligé de naviguer de nuit, le RUBIS ne verra la fin de cet incident que vers le 11 juin. Pendant ce temps, le sous-marin alterne la puissance de ses 2 moteurs afin de maintenir un cap et de tourner en rond en immersion de jour. Il est même envisagé la récupération de l’équipage par un autre sous-marin et le sabordage du RUBIS. Ce n’est que le premier, qu’une éclaircie météo permet aux mécaniciens d’atteindre l’arrière du sous-marin et remettre la goupille associant un cardan à la transmission de barre qui s’était désolidarisée. Le 19 juin il est de retour à Dundee.
La 10ème mission (14 au 25 août 1941) a failli bien être l’ultime sortie du RUBIS. L’opération consiste à miner l’entrée d’Egersund. Le 21 août, une dizaine de mines larguées et tandis que leurs cartouches de sel se désagrègent dans l’eau libérant les mines juste sous la surface retenue à leurs socles de fonte par une chaîne, le pacha aperçoit dans le périscope un pétrolier de 3000 tonnes escorté d’un chalutier armé.
L’occasion est trop belle, l’ordre du commandant Rousselot tombe : « Tube arrière….paré ?…..feu ! ». Mais la torpille reste dans son tube, et le convoi est perdu de vue. Le RUBIS continue son opération et navigue vers son prochain mouillage. A nouveau, un convoi apparaît dans le viseur du périscope, très proche. Il est 14 h 25 mn, l’attaque est décidée. Dans la salle des torpilles : «Tube 1 et 2 Parés, attention … Tube 1 Feu !…Tube 2… feu !»
Deux torpilles sont lâchées à 5 secondes d’intervalle et font but sur le bâtiment de tête, un cargo de 4000 tonnes à moins de 500 mètres. Le RUBIS est très violemment secoué par les explosions et il est sûr que des dégâts sont à envisager. Néanmoins, le commandant Rousselot éloigne son bâtiment au plus vite des lieux de l’attaque et se pose par 41 mètres de fond. Aux hydrophones, les veilleurs entendent le Hogland (cargo de 4360 tonnes) sombrer dans de sinistres craquements....
Et l’attente commence, troublée pas le bruit des hélices des escorteurs passant au dessus d’eux. Ils ne seront pas repérés. Mais les avaries subies par le RUBIS du fait de l’attaque réalisée de trop près se font ressentir. 90 éléments de batteries sont détruits, l’acide se répand dans les bacs, les vapeurs toxiques rendent l’atmosphère irrespirable . Il est maintenant 22 h 00. Aux hydrophones tout paraît calme et un retour « surface » est décidé. Les ordres tombent : « Paré à faire surface… moteurs en avant lente ! »
Les moteurs électriques restent silencieux ! Le pacha ordonne «Chassez ballast arrière ! » et toujours aucune réaction du sous-marin. L’angoisse étreint tout l’équipage, et c’est un véritable soulagement quand après que le commandant Rousselotait ordonné «Chassez ballast avant !» le RUBIS frémit, se décolle du fond et émerge avec un angle de 50°, malmenant une nouvelle fois navire et personnel de bord . Le panneau du kiosque est ouvert, pendant que l’équipage fait la chaîne pour écoper l’acide et le jeter à la mer, les électriciens tente de redonner l’électricité pour démarrer les moteurs diesel. Une réparation de fortune permet rapidement au RUBIS de s’éloigner de la zone heureusement désertée par les navires ennemis. La situation semble revenir au «beau fixe» pour le sous-marin.
Des avions sont envoyés à sa rencontre en protection aérienne et les coordonnées des portes du barrage de mines allemand sont envoyées au RUBIS afin de tracer sa route. Mais celui-ci doit s’arrêter maintes fois pour isoler des éléments de batterie dégageant des vapeurs acides et de la fumée rendant l’air toxique et irrespirable.
L’équipage est contraint de rester sur le pont, certains préférant y rester dormir. Au cours de la nuit, un second maître canonnier s’agitant dans son sommeil, glisse le long de la coque et tombe à la mer. Les recherches effectuées resteront vaines, son corps ne sera pas retrouvé.
L’inquiétude à l’amirauté britannique est de plus en plus vive et on évoque la possibilité de secourir l’équipage en ayant recours à des hydravions et de détruire le RUBIS. La détermination du commandant Rousselot et de son équipage ne faillira pas. «On était parti avec le RUBIS, on rentrera avec !» Les électriciens, masque à gaz sur le visage s’affairent et vaille que vaille, à quatre nœuds, le sous- marin continue sa route vers une escorte composée d’un croiseur anti-aérien le HMS Curaçao et de deux destroyers le HMS Lightning et le HMS Lively. Ordre a été également transmis à un sous-marin hollandais, le «014», de se dérouter vers la zone où se situe le RUBIS. Finalement, pris en remorque, il s’amarre à nouveau à un quai du port de Dundee le 25 août 1941.
Le RUBIS sous son immatriculation britannique P15
Le commandant Rousselot au périscope Photo : revue Océans
Source : Site de l'Ordre de la Libération 22 août 1941 - Le Rubis en avarie au large de la Norvège
HONNEUR ET GLOIRE
Le navire entre alors dans une période de réparation de plusieurs semaines. Le 14 octobre 1941 au cours d’une cérémonie officielle, le RUBIS reçoit des mains du Général De Gaulle la Croix de la Libération.
Source : Site de Ordre de la Libération
Le 18 novembre, à nouveau opérationnel, il commence une 11ème mission (18 novembre au 6 décembre 1941)au large du phare d’Utvaer par une météo effroyable.
Début janvier, lors de la 12ème mission (8 au 20 janvier 1942), il effectue un largage de mines devant St Jean de Luz. Lors de son retour, sous escorte, le convoi qui se situe probablement en Manche où les sous-marins alliés transitaient toujours en surface et escortés pour éviter les méprises, est repéré par un Junker JU 88 qui largue 3 bombes. Celles-ci tombent à cent mètres environ sur son arrière sans causer de dégâts.
Les missions se succèdent à un rythme plus que soutenu :
13ème mission : (12 au 16 mars 1942), sera un mouillage de mine dans le Jütland.
14ème mission : (8 au 14 avril 1942), le ramène au large de Trondheim.
15ème mission : (22 mai au 14 juin 1942), on l’aperçoit dans le Golfe de Gascogne.
16ème mission : Un drame éprouvera profondément l’équipage du RUBIS lors de cette mission (30 juin au 15 juillet 1942). De retour d’un mouillage de mines devant Arcachon, le chasseur de sous-marin n° 8 RENNES des FNFL devant lui servir d’escorteur est coulé par la Luftwaffe. Un seul marin de l’équipage survivra. Le Rennes s'apprêtait à prendre près du Cap Lizard l'escorte du Rubis remontant La Manche.
17ème mission : (8 au 18 août 1942), interrompt le trafic de minerai de fer en provenance d’Espagne.
18 me mission : (10 au 24 septembre 1942), une opération de minage en Mer du Nord voit le RUBIS contraint à plonger en catastrophe à plusieurs reprises suite à des alertes aériennes.
Son état nécessite un important carénage de plus de 8 mois, et ce n’est qu’en juin 1943, après une période d’essais, que le RUBIS rejoint la 5 ème Flottille à Gosport.
19ème mission : (29 juin au 6 juillet 1943) le mène devant Biscarosse où ses mines coulent un patrouilleur allemand et un petit bâtiment.
20ème mission : (1 au 8 août 1943). Mines larguées dans le Raz de Sein et devant Brest.
21ème mission : (23 août au 11 septembre 1943) : devant Bayonne, et malgré la présence de 4 torpilleurs ennemis, le RUBIS largue ses mines sans être repéré.
22ème mission : (22 septembre au 9 octobre 1943) : le mouillage des mines provoque la perte d’un chasseur de sous-marin allemand.
Mais une nouvelle période d’inactivité est nécessaire au RUBIS afin de procéder à la réparation de fissures au niveau de la coque épaisse.
23ème mission : (30 février au 3 mars 1944) : mines coulées à l’ouest de Lacanau.
24ème mission : (17 au 31 mars 1944) : mouillage de mines dans le Golfe de Gascogne. Il rejoint le port de Dundee et y reste en «stand by» pour cause de préparation de l’opération Overlord
25ème et 26ème mission : Le RUBIS reprend du service en septembre (18 au 29 septembre 1944 et 14 au 26 octobre 1944) où successivement il coulera ou endommagera deux bâtiments de 5749 et 5295 tonnes et trois escorteurs au large de la Norvège.
27 ème mission : Toujours dans le même secteur, (18 au 29 novembre 1944) il endommage le Castor de 1683 tonnes.
28 ème mission : (13 au 24 décembre 1944) du RUBIS sera la dernière en opération de guerre, mission au cours de laquelle il coulera 2 escorteurs et un cargo de 5190 tonnes. Une dernière victime du RUBIS sera un dragueur lors des opérations de déminage qui suivirent cette mission.
Le sous-marin RUBIS, comme nombre de sous-marin anglais, arborait son JOLLY ROGER (pavillon noir !) en rentrant d’une mission réussie. Le «JOLLY ROGER» du RUBIS est particulièrement éloquent !
A titre d’information, les bandes blanches représentent les navires de commerce coulés, les bandes rouges, les navires de guerre. Le glaive illustre la mission de débarquement d’un agent. Les bandes barrés par une torpille pour chaque navire coulé à la torpille, et chaque mine blanche pour évoquer une mission de mouillage.
Le 12 juin 1945, l’équipage du RUBIS voit disparaître les côtes anglaises. Il pénètre dans le port d’Oran le 23 juin où il est désarmé et abandonné par son équipage. Son aventure ne s’arrêtera pas là. Caréné et réarmé à Oran, il regagne Toulon où il servira, entre autre, lors d’exercices d’écoute sous-marine, de mouillage de mines d’exercice. Le vieux submersible participera à des entraînements combinés avec des avions et des bâtiments de surfaces. Il effectuera des "croisières" qui le mèneront dans les ports d’Afrique du Nord comme Alger, Bizerte, Bône, Oran, Casablanca, ou plus au nord comme Lorient ou Brest.
"CHIENNE DE GUERRE" & CHIEN DE GUERRE
L’histoire ne saurait être complète si nous n’évoquions pas BACCHUS, le chien mascotte du RUBIS durant toutes ses missions.
L’embarquement de chien dans les sous-marins remonte à l’origine même du sous-marin, quand les analyseurs d’air n’existaient pas. Les chiens marchant au ras du sol étaient les premiers à ressentir les effets des gaz lourds que sont le CO2 (dioxyde de carbone) et le CO (monoxyde de carbone). Certains de ces chiens eurent des fins tragiques.
Pour Bacchus, l’aventure fût plus que glorieuse et il devint certainement le chien mascotte le plus célèbre. Il reçut, en effet, de la très sélecte ligue de défense canine britannique, le «VALIAND DOG» en hommage à son sang froid durant toutes les mission accomplies à bord du RUBIS et en particulier lors de la 10ème patrouille et eu même l’honneur d’un article dans un grand journal anglais.
AUTRES PHOTOS HISTORIQUES EXTRAITES DU LIVRE DE Maurice PASQUELOT
L'Aspirant LAMY erescapé de la corvette Mimosa coulée dans l'Atlantique Nord Officier du Rubis
Le Général De Gaulle décore de la Croix de la Libération le Capitaine de Corvette Rousselot, Commandant du Rubis. A gauche, le capitaine de frégate Querville, commandant la Junon A droite, en partie caché par le Général, le premier maître Justin Dangel, patron mécanicien du Rubis
L'aspirant BESNAULT évadé de France, a fait ses classes sur la corvette Aconit avant d'embaruer sur le Rubis Il finira sa carrière avec le grade d'amiral après avoir été aide de camp du Général De Gaulle
UN SABORDEMENT POUR UNE RENAISSANCE
C’est à Toulon qu’il terminera sa carrière où ,servant à l’école d’écoute, de nombreuses avaries le condamneront. Il est définitivement retiré du service en 1950.
Le 31 janvier 1958 au large du cap Camarat, une explosion retentit. Une charge de 9 kilos fait exploser l’arrière du RUBIS qui se dresse et coule !
Peu de temps avant, le remorqueur Sanson et la gabare Criquet l’avaient positionné à cet endroit afin d’en faire un but sonar destiné à l’entraînement des escorteurs de la Marine Nationale.
Du fond de la Méditerranée, le RUBIS fût encore une fois le témoin d’une scène émouvante. L’amiral CABANIER, premier commandant du sous-marin passé aux FNFL, décédé le 26 octobre 1976, avait souhaité que ses cendres soit immergées dans leur urne au dessus de l’épave du RUBIS. La cérémonie fut célébrée à partir du sous-marin Daphné, saluée par les honneurs au sifflet de marine rendue par un gabier et une salve de 19 coups de canon tirée par les marins de l’escorteur d’escadre Guépratte.
Escorteur d’escadre Guépratte et sous-marin Daphné Site de Net Marine
POURQUOI CE NAVIRE N A T-IL PAS ETE FERRAILLE MAIS COULE ?
L'ouvrage Portrait d'épaves JP Joncheray évoque clairement cette dernière hypothèse en citant l'amiral Cabanier par ces mots :
En 1957, la Royale, en quête d’un but sonar pour l’entraînement des escorteurs du G.A.S.M (Groupe d’Action Anti-Sous-marine), commandé par l’amiral Cabanier, désigne le RUBIS destiné à la ferraille. Cabanier, en souvenir des anciens combats, trouve injuste, sinon indigne une telle décision ; il préfère le couler au large du Cap Camarat.
"Le sous-marin RUBIS avec le souvenir de son équipage, symbole de tous nos disparus en mer, repose au large de Cap Camarat enveloppé dans son linceul marin qui ne pouvait être que le sien, coulé volontairement par un de ses anciens commandants de la guerre, qui refusa de livrer sa dépouille aux acheteurs de ferraille"
Plus tard, dans son livre "Croisières périlleuses" l’amiral Cabanier écrit : "Ce vieil et glorieux serviteur ouvrit pour la dernière fois ses purges, panneaux ouverts, et s’enfonça à jamais dans la seule sépulture qui fut digne de lui..."
Ainsi finit le sous-marin RUBIS... une bonne raison pour voir le RUBIS autrement la prochaine fois que vous lui rendrez visite !
MA PLONGEE SUR LE RUBIS AVEC LE GRIEME
(Le Sommeil des épaves se pose sur le RUBIS - Photo de Patrice Strazzera)
Plonger sur un sous-marin en France ou ailleurs n’est pas chose facile. Malgré le grand nombre coulés lors des deux derniers conflits et l’hécatombe que ce fût, peu sont à notre portée ! La cause : profondeur et éloignement des côtes ! Le Rubis de ce fait, est une véritable aubaine. Imaginez ! Aller explorer sous l’eau l’épave d’un navire dont la vocation était d'être sous l'eau !
Le fait que cette épave soit visitée par les clubs Varois, sa proximité des ports de la région, sa relative faible profondeur et malgré parfois des courants violents sur le site, ont contribué à son succès et des milliers de plongeurs peuvent se targuer, sinon de bien la connaître, du moins d’avoir partagé avec elle quelques minutes d’intimité et d’émotion.
Et c’est bien dans cet état d’esprit que, le bout de mes palmes dépassant déjà du pont de SUBTIL, je m’apprête à me jeter à l’eau. Des réflexions aussi simples que « pas de jus !» « visi d’enfer ! » « que du bonheur ! » me viennent en tête en me déhalant le long du mouillage tandis que la masse sombre du RUBIS commence à se détacher de la blancheur immaculée du sable coquillier sur lequel il repose.
Rassuré par le grognement caractérisant son enthousiasme, émis dans son détendeur par François, mon binôme, je quitte le mouillage et incline ma descente vers l’avant de l’épave que je dois photographier.
« L’AVANT », je me remémore cette photo de Kurt Amsler, cette photo si souvent utilisée pour illustrer articles dans les revues, les livres, voire des publicités.
Sitôt arrivé, après m’être redressé et stabilisé, je cherche la position, l’angle que lui-même a dû imaginer pour rendre si photogénique cette partie de l’épave. Pas grand risque d’être accusé de plagiat… nos talents et notre matériel n’ayant pas grand chose de comparable !
La vision est vraiment saisissante et la beauté de cette étrave posée en porte à faux, sous laquelle un plongeur peu passer est éblouissante. Je m’abstiens de me hasarder à cette profondeur. Le caisson de mon appareil photo est donné pour trente mètres et la raison me stabilise donc à trente cinq mètres !
L’étrange appendice de cisaillement surmontant le dessus de l’étrave photographié en gros plan, François balaye le pont avec sa caméra.
Je poursuis mon chemin vers l’arrière, et là je «mitraille» les tubes lance-torpilles pivotants de 550 mm qui se trouvent sur le pont.
L'appendice de cisaillement à l'étrave du sous-marin d'un mètre de long, muni des ses "dents" destinées aux orins des mines et filets d'acier. Au dessous, défilent les vannes, pompes, tuyaux, bouteilles d’air comprimé, situés à l’extérieur de la coque épaisse et que le plancher disparu laisse entrevoir.
L’écran de mon appareil me rassure, j’aurai de «fameux souvenirs ». Mais le temps me rattrape et mon ordinateur se rappelle à mon bon souvenir ! En passant devant le kiosque, regagnant le mouillage, une murène de belle taille retient mon attention, ajoute au passage quelques minutes de plus à mon temps de "déco" et prend elle aussi une place sur l’écran de mon Olympus.
Récit et photos sous-marines (couleurs ci-dessus) : Dominique RESSE Stage épaves à Giens avec le GRIEME - Juin 2007 (Photo : Patrice Strazzera)Et sur un signe de François, c’est la lente remontée le long du mouillage et l’attente sous la surface !
Si ce récit de l’histoire du RUBIS vous a donné envie d’en savoir plus sur celui ci et sur les autres, et ils sont nombreux à être restés au fond, je ne saurais que vous conseiller la lecture du très complet et très luxueux livre de Jean Louis MAURETTE : Les gardiens du Silence épaves de sous-marins à travers le monde.
SEQUENCE PHOTOS - VIDEOS
Avec la collaboration de Jean-Louis MAURETTE (Reproduction interdite sans autorisation du GRIEME ou de Jean-Louis MAURETTE)
Différentes images du RUBIS et de son équipage y compris Bacchus la mascotte Voir commentaires sur chaque image en positionnant votre souris sur l'image (Source ECPA et Collection C.Picard)
REMERCIEMENTS
Le GRIEME remercie tout particulièrement l'Amiral Jacques ZANG (ci-dessous à gauche sur la photo) pour sa "lecture" de notre fiche sur le RUBIS et pour l'aide qu'il nous apporte dans toutes nos recherches ECPA Editions MARIUS-BAR de Toulon Site AGASM Section Rubis Site de Netmarine Site france-libre.net Site de l'Ordre de la Libération Anne & Jean-Pierre Joncheray Patrice Strazzera Collection C.Picard Jean-Louis Maurette Sub-Plongée de Giens Eric Verpiller
BIBLIOGRAPHIE - A LIRE A VOIR
Les Gardiens du Silence de Jean-Louis Maurette Les sous-marins de la France Libre 1939-1945 de Maurice Pasquelot aux éditions Presses de la Cité La marine française pendant la seconde guerre mondiale de l'amiral Auphan et Jacques Mordal aux éditions Hachette (1958) Les sous-marins français 1918-1945 de Claude Huan aux éditions Marines Plongées sur les plus belles épaves de Provence d'Isabelle Croizeau publié aux éditions Glénat Film : Une plongée du Rubis réalisé par les "Mousquemers" Cousteau-Dumas-Taillez Princes des épaves avec les apnéistes Pierre Frola et Fred Buyle. Film de Jérôme Espla/Production Poisson-Lune (Visionner la bande annonce Prince des épaves , cliquer ici) A la découverte des grandes épaves d'Egidio Trainito aux éditions Solar
(Ecusson à coudre du RUBIS - Disponible sur le site du Sommeil des Epaves)