GRANVILLE
- Nom : Granville
- Type : caboteur
- Nationalité : française
- Construction : lancé le 18/12/1929 au chantier Cochrane & Sons Shipbuilders Ltd. A Selby (GB)
- Propriétaire : Société Havraise de Transport et de Transit Le Havre, puis Marine nationale
- Dimensions : long. 51,9 m larg. 8,7 m - prof. cale 2,7 m
- Tonnage : 511 tonneaux brut
- Motorisation : machine triple expansion de 87 CV fournie par C. D. Holmes & Co. à Hull (GB)
- Vitesse : 11,3 nœuds
- Equipage lors du naufrage : 45 membres
- Armement : deux mitrailleuses jumelées 8 mm - six grenades anti-sous-marines
- Naufrage : 13 juin 1940 par artillerie côtière
- Coordonnées géodésiques : 49° 54'370 N - 00° 32'146 E
Le Granville (avec l'aimable autorisation des (Editions Marius BAR) - Reproduction interdite sans autorisation
Le Granville est un petit cargo destiné au cabotage le long des côtes de La Manche. Il est construit au chantier Cochrane & Sons de Selby, sur le fleuve Humber en amont de Hull (GB). Lancé le 18 décembre 1929, il sera remis à son commanditaire français début 1930, une fois la machine posée et les essais réalisés.
Pose de la machine sur le Granville
A partir de son port d’attache havrais, il mène une vie sans histoire (du moins nous n’avons pas retrouvé de faits marquants en archive) pour le compte de la Société Havraise de Transport et Transit, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
A la fin de 1939, la Marine nationale le réquisitionne pour en faire un mouilleur de mines (ou un ravitailleur auxiliaire suivant sources). Il portera le matricule X79.
Nous n’avons à ce jour quasiment pas trouvé d’infos sur la carrière militaire du X79 Granville (a-t-il participé à l’évacuation de la poche de Dunkerque ?), jusqu’au funeste jour du 13 juin 1940.
Le Granville à quai
Depuis plusieurs jours, les troupes françaises et britanniques, poussées par la 7ème division de panzer de Rommel, refluent le long de la côte pour trouver un point d’embarquement vers l’Angleterre. Face à l’encerclement imminent des troupes sur Saint-Valéry-en-Caux, puis Veules-les-Roses, quelques milliers d’hommes vont réussir à s’embarquer à bords de flottilles hétéroclites réquisitionnées par les amirautés les 11 et 12 juin.
Le 13 juin, c’est trop tard. 40 000 hommes encerclés ont été faits prisonniers, dont 12 généraux français et anglais. Le matériel saisi par les Allemands est également conséquent : 58 chars, 56 canons, 368 mitrailleuses, 1 100 camions.
Pourtant ce 13 juin, plusieurs navires vont encore se présenter devant Saint-Valéry, sans savoir que la ville est aux mains de l’ennemi. Depuis la débâcle de Dunkerque, les états-majors n’arrivent plus à suivre et la communication, quand il y en a, est on ne peut plus confuse. Les Allemands vont laisser les deux plus gros navires s’approcher (Le Granville et le Train-ferry N° 2).
TF2 coulé le 13 juin 1940 au cap d'Ailly
Le TF2 arrive de Southampton. Les artilleurs allemands vont s’acharner à l’approche de ce grand bâtiment. Des manœuvres échappatoires sont immédiatement tentées mais, sous les nombreux impacts, le navire prendra feu. Ses chaudières crevées ne lui permettent plus d’être manœuvrant. On compte déjà 14 victimes, la vingtaine de membres d’équipage restant abandonne le train-ferry et sera récupérée au large par les chasseurs britanniques N° 6 et 7. L’épave dérivera ainsi plusieurs heures, rongée par les flammes ; elle finira par s’échouer et sombrer sur les roches d’Ailly...
Même scénario pour le Granville. Il n’est plus qu’à quelques centaines de mètres du port quand les panzers embusqués sur le front de mer ouvrent le feu. Rapidement, un obus perse son flanc et détruit sa machine. Simplement armé d’une double mitrailleuse de 8 mm, l’équipage est bien incapable de riposter. Le caboteur devenu inerte subit toujours le feu ennemi qui ravage et tue tout le personnel de passerelle.
Le Granville, suivant la marée descendante, commence une lente dérive vers Paluel. Une épaisse fumée sort de sa salle des machines, puis bientôt les flammes, quand soudain une terrible explosion pulvérise sa poupe. Les six grenades anti-sous-marines qu’il transportait sur la plage arrière ont sauté. Le navire finira par sombrer à quatre milles au nord-ouest de Veulettes.
Chaloupe ramenant des survivants du Granville
Les survivants, affolés par la déflagration, se sont jetés à l’eau pour échapper au brasier et aux tirs. Ils vont être repêchés par une chaloupe et un canot arrivant du large à leur rencontre. Il s’agit des embarcations du chalutier Anne-Marie qui, heureusement, est resté hors de portée des canons allemands. Le navire de pêche gagnera ensuite Cherbourg.
Chaque plongée sur cette épave est une expérience nouvelle
Elle subit un ensablage et un désensablage permanent, ainsi le paysage change à chaque fois. D'autant plus que le premier niveau du pont, désormais posé dans le sable, une dizaine de mètres sur tribord avant de l'épave, ne s'est détaché du navire que cinquante-six ans après le naufrage.
Jusqu'en juin 1996, ce bloc était encore à sa place sur la carcasse. La balade sur l'épave est l'occasion d'apercevoir les sanitaires en faïence du navire. A bord, les W.C. étaient de type turc…
La date du conditionnement est encore lisible : 2 mars 1928. Tout y est, notamment la qualité de la poudre utilisée. A force de fureter à droite et à gauche sur l'épave, de noter des détails, de prendre des relevés et des mesures, les plongeurs se sont mis à douter. Car la documentation réunie à la surface ne correspond pas exactement à ce que les plongeurs constatent sur le fond.
Malgré tout, nous pensons avec assez de conviction que nous sommes bien en présence du Granville. Ce qui est troublant, c’est la présence d'un treuil à l’extérieur de l’épave qui n’a rien à faire là, ainsi que des hublots, issus d’une bordée détachée au sable, dont les tapes indiquent un fournisseur havrais. Comment un navire construit en Grande-Bretagne peu-ilt avoir des hublots havrais ? Ils ont pu être changés après me direz-vous, il y a aussi les photos du navire qui ne montrent aucune bordée avec une lignée de hublots…
Il faut se rendre à l’évidence, cette épave du Granville possède des pièces rapportées d’une autre épave (rejetées là par des chaluts ?). Nous connaissons deux morceaux d’épave à proximité (que nous appelons Granville 2 et Granville 3), que nous n’avons pas encore bien investigué…
Par exemple, nous savons que ce jour-là un troisième navire se nommant Léopard a été coulé…
Alors à suivre…
BRIEFING PLONGEE
(Dessin de Jean-Luc Lemaire - GRIEME)
La plongée sur le Granville reste une plongée relativement facile et sans vrai risque, car aucun endroit ne permet de pénétrer l'épave.
Le seul risque sur cette épave est le même que sur toutes les épaves de Manche, à savoir le courant et la profondeur. Il est impératif de plonger à l'étale et de préférence par petits coefficients car, en fonction de ceux-ci, le fond sur lequel repose l'épave vari de 28 m à 35 m.
L'épave de ce cargo long de 51 m est d'un seul tenant, orientée Nord / Ouest par l'avant. La proue se dresse fièrement, malgré toutes les ouvertures que l'on peut y voir, et les bars y sont chez eux, jusqu'à l'apparition des premières palanquées. Si l'on flâne quelque peu sur le haut de l'épave, on pourra découvrir les W.C. à la turque (voir photo 1) et une caisse de munition "Lebel" (voir photo 2).
(voir photo 3) On peut ensuite descendre sur le tribord avant jusqu'au sable pour apercevoir, chose rare de nos jours, trois hublots encore intacts et complets, avec le verre et la tape gravée au nom de "Maugard", fabriquant dont l'enseigne existe encore au HAVRE.
S'en suit une balade sur le sable qui recouvre l'épave avant d'arriver à la chaudière et au moteur triple expansion ; un classique de l'époque.
Morceau de charbon retrouvé sur le Granville
Le tour complet se terminera par la visite de l'hélice quadripale et du gouvernail, au milieu de nombreux morceaux du navire déformés par l'incendie qui ravagea le navire avant qu'il ne sombre. La faune reste ici, comme sur toutes nos épaves de Manche, constituée de bars, tacauds, vieilles, congres et homards.
La qualité des prises de vue sous-marines varie selon les conditions de visibilité lors des plongées. Parfois, nous bénéficions de conditions exceptionnelles, parfois c'est "moins bon". Nous vous proposons malgré tout quelques images du Granville, prises par notre association.
Images en vrac du Granville
LOCALISER L'EPAVE
49° 54' 430 N - 00° 32' 220 E - Point GPS : Euro 50
Mise à l'eau la plus proche : port de Saint-Valéry-en-Caux, ou de Fécamp (distance égale : 4,8 M).
Club de plongée sortant le plus fréquemment sur le Granville : PVCA - 02.35.97.80.76.
Retrouvez le Granville dans "La Saga des Epaves de la Côte d'Albatre", éditée par le GRIEME, en vente par correspondance sur notre site internet.
· Editions Marius Bar
. Recueil de l'Abbé Falaise - Curé de Saint-Valéry-en-Caux en 1940
· Journal, lettres de Rommel
. Service historique du château de Vincennes
. La Marine marchande - Editions Marines
. Rouen, Le Havre, Antifer, ports de Seine Amiral Le Potier - Edition France Empire
. Centre historique minier de Lewarde
. M. Michel Debeve de la commune d’Aniche.