MONA LISA

Le Navire
L'Histoire

 

  • Nom : MONA LISA

  • Type : Cargo

  • Nationalité : Norvégien

  • Construction : Non Renseigné

  • Propriétaire : Non Renseigné

  • Dimensions :  96 m    

  • Tonnage : Non Renseigné

  • Motorisation : Non Renseigné

  • Vitesse : Non Renseigné

  • Armement : Non Renseigné

  • Date Naufrage : 28 mars 1950 

  • Positionnement Coordonnées géodésiques : Non Renseigné

 

Le Mona Lisa

 

QUAND L'HISTOIRE SE REPETE INLASSABLEMENT

Silhouette du Mona Lisa

 

28 mars 1950 Arrivant d’Ouessant pour gagner Dieppe ou il est attendu, un cargo bananier se perd dans le brouillard.


Le Mona LisaLe MONA LISA, navire norvégien de 96 mètres talonne sur les roches d’Ailly. Son seul salut sera d’avoir eu affaire à une compagnie sérieuse et qui est encore là de nos jours pour sauver ces navires en perdition et leurs équipages.

Il était difficile pour nous de passer sous silence ce naufrage des années 1950. La première raison vient des photos de l’époque qui retrace en quelques clichés un travail phénoménal entrepris par la compagnie des Abeilles du Havre. La seconde raison est que ce naufrage qui mît en œuvre cette compagnie, nous permet de vous conter, dans ce chapitre, quelques autres péripéties de cette dernière.

Toujours en rapport avec des naufrages ayant eu lieu sur notre littoral, il aurait fallu un ouvrage complet pour tous vous les raconter dans le détail.

Là n’était pas le but, mais un hommage à ces hommes et à ces navires était nécessaire, car une partie de leur travail réside dans le sauvetage de ces derniers.

La passion de son travail le conduit à écrire et à raconter ces « Abeilles » qui longtemps encore bourdonneront autour de lui« Théo », c’est ainsi que l’appelle ses proches, Théo est une des personnes les plus extraordinaires qu’il nous ait été donné de rencontrer durant l’élaboration de notre Saga.

Une mine d’or en documentation sur tous ce qui a pût se passer dans cette compagnie des Abeilles. Recherchant le seul vrai document existant sur un des navires que nous vous racontons quelques pages plus loin, nous avons eu l’occasion de passer une après midi avec lui, et c’est ce qui nous a donné envie de vous raconter en quelques lignes cette fabuleuse épopée de la compagnie des Abeilles du Havre. Et c’est en tournant une à une les pages de ces archives fabuleuses, que sont apparus ces clichés sur le Mona Lisa et d’autres qui illustrent aussi certains autres chapitres de cet ouvrage.

 

 

Le remorquage

Le Mona Lisa

Avec l’expansion du commerce maritime, il n’est plus permis d’attendre les bons vents et le halage à la main des voiliers pour les manœuvres d’entrée et sortie du port. Les navires se bousculent en rade et il est temps d’innover en la matière, surtout depuis l’utilisation de la vapeur comme énergie propulsive.

Dès 1818, le Consul des Etats-Unis au Havre, M. Beasley rachète à Bordeaux le « pyroscaphe » Triton et l’affecte au « passage de l’estuaire », jusqu’alors assuré par trois sloops à voile. Le Triton n’est certes pas un remorqueur pur mais, à l’occasion, il peut « prendre en remorque » des voiliers en panne de vent ou en difficultés et, moyennant finances sans doute, ajoute cette office secondaire à son activité principale.

Puis les années passent, perfectionnant les techniques et précisant les avantages pour les voiliers de ces navires à propulsion mécanique. Ainsi le 15 mars 1835, le Français, propulsé par une Machine de 50 Cv, est mis en service à fins de remorquage par MM. Vieillard et Cie, armateurs havrais, préludant aux 6 Compagnies qui, en 1845, proposeront un service de remorquage : Cie « Rouennais » (3 Remorqueurs), Cie Bertin (3 Rem.), Cie Vieillard (4 Rem. Dont le FRANÇAIS), Cie Mailley-Duboullay (4 Rem.), Cie E. Lahurie (1 Rem.) et Cie L. Lamoisse (1 Rem.). Les puissances utilisées à l’époque s’échelonnent de 50CV à 140CV. Dix années plus tard, c’est 44 remorqueurs qui composent la flotte de déhalage des voiliers de commerce sur le port du Havre.

Avec la création de la « Compagnies de Remorquage Les Abeilles », en 1864, débutent l’ère des remorqueurs à hélice. Deux unités, en bois, la composent d’abord, les « Abeilles 1 et 2 », qui seront suivies jusqu’en 1879 des unités à construction métallique : Abeille 3, 4, 5, 6 et 7.

Mona Lisa

D’autre part, « La Transat » crée une compagnie en 1882, qui sera dissoute en 1957. Cette compagnie utilise notamment des unités tels que le  Minotaure, la République, le Titan (remorqueur anglais de 1200 CV acheté en 1913) et Ursus, le premier des remorqueurs portant ce nom fera naufrage en 1926 et le second deviendra l’Abeille n°13.

Et pendant ce temps, la « Compagnie de Remorquage les Abeilles » se développe toujours, avec ses joies, mais, hélas aussi ses peines. Ainsi, le 23 janvier 1892, survient l’accident tant redouté dans ce métier particulier du remorquage : l’abordage du remorqueur par son remorqué.

En remorque

Le premier accident tragique

Il est 16 h 00 et en cet après-midi du 23 janvier 1892, la foule habituelle s’est rassemblée sur la « Jetée » pour suivre la manœuvre de sortie du paquebot, la Normandie, placé sous les ordres du Commandant Laurent. Le manque d’eau dans le chenal rend cette manœuvre particulièrement difficile et les remorqueurs la République croché à l’avant et l’Abeille IX croché à l’arrière donnent toute leur puissance.

Probablement trop sollicitée, la remorque de l’Abeille IX finit par se rompre et le commandant Laurent demande alors à ce remorqueur de venir aider son collègue sur bâbord-avant.

Le Capitaine Hubert de l’Abeille IX s’exécute, dès ses débris de remorque dégagés et remonte le paquebot sur son tribord.

C’est alors, qu’il parvient à la hauteur de l’étrave de ce dernier, que le paquebot augmente son allure, pour se libérer du « maigre d’eau » qui l’attire encore, abordant le remorqueur et le coulant en quelques instants.

Malgré une manœuvre désespérée du Commandant Laurent qui bat en arrière, tout en dépit des risques encourus par son propre navire, il est trop tard pour le remorqueur et l’accident se solde par 7 marins décédés ; seul le Capitaine Hubert, 2 mousses et 2 matelots s’en tirant miraculeusement

 

La 1ère guerre Mondiale, les débuts du sauvetage

 

En 1914, à l’entrée de la «Grande Guerre», la compagnie les Abeilles  possède 10 remorqueurs, pour une puissance totale de 6 750CV. Peu avant, elle a commencé à se diversifier en créant la société «Remorquage et Transports pour Chalands et Allèges de Mer» qui deviendra plus tard la « Société Havraise de Transport et de Transit ». Mais c’est surtout dans le remorquage hauturier et l’assistance en cas de sinistre maritime qu’elle se développe et se fait remarquer.

Ainsi de 1914 à mai 1940, elle alignera 291 interventions d’assistance tandis que, pour la même période, elle assurera 442 remorquages hauturiers. La majeure partie de ces derniers se déroulent le long des côtes européennes mais quelques-uns uns entraînent certains des remorqueurs Abeille et notamment l’Abeille n°22 (construit en 1919 et acquis par «Les Abeilles» en 1925) jusqu’aux Côtes Ouest-Africaines et en Méditerranée Occidentale.

Quant aux «assistances », en dehors de celles exécutées par ce même Abeille n°22 au large de la Bretagne, elles ont surtout pour cadre La Manche, la Seine et la Baie de Seine.

Ainsi, pour citer quelques exemples : l’intervention de l’Abeille n°12 sur le Galeka le 26 octobre 1916, le renflouement en juillet 1915 du vapeur anglais City of Lucknow échoué sur les roches « de l’Eclat », le renflouement en août 1924 du paquebot transmanche Newhaven échoué près de Dieppe, le renflouement en Seine, en 1927, du cargo anglais Emilie Dunford, le renflouement en février 1928 du chalutier Paul Magne, échoué au lieu dit « le trou au chien » près de Fécamp, le renflouement en janvier 1930 du vapeur brésilien Alegrette échoué sous les falaises d’Octeville et un mois plus tard en février, le renflouement du cargo français Georges et Henri échoué près de Jumièges en Seine.

Autant d’opérations, plus ou moins périlleuses, qui exigeaient une compétence certaine et qui se perpétueront ultérieurement. Mais, durant ces mêmes années, le quotidien de cette Société qui en 1928 devient la S.A.R.L. «  Compagnie de Remorquage et de Sauvetage Les Abeilles » est hélas, encore marqué par un drame similaire à celui de l’Abeille n°9 en 1892 et, cette fois, c’est l’Abeille n°10 qui en est la victime.

 

Une deuxième Tragédie dans le port du Havre

Le 8 octobre 1926, 23 h 30, le paquebot Paris rentre tout illuminé dans le nouvel avant-port du Havre, escorté par l’Ursus et le Titan, les deux remorqueurs de la « Transat » commandés par deux frères, les capitaines Audren. C’est la manœuvre la plus délicate, après de vaines tentatives pour prendre les amarres du Paris, l’Ursus se retrouve trop prés de l’étrave du paquebot et c’est de nouveau l’accident. Le choc est violent, le remorqueur est pris par le travers tribord, les chaudières explosent dans une gerbe de vapeur et d’écume, tout en sombrant instantanément. De nouveau dix victimes et six rescapés dont un décède plus tard à l’hôpital.

 

Second drame pour les Abeilles

Il est 9 h 40, ce 1er avril 1938, lorsque le pétrolier norvégien de 8 291 tonnes, le Mosli, entre dans le port. Deux remorqueurs se présentent pour l’assister, le Cherbourgeois III à l’arrière, qui a déjà saisi sa remorque, et l’Abeille X  à l’avant, qui a son tour va récupérer l’amarre. La poupe du remorqueur se trouve prés de l’étrave du pétrolier lors de la manœuvre et c’est la collision. Le remorqueur coule par l’arrière, tout en glissant à bâbord, le long de la coque du pétrolier. Sur les neuf hommes d’équipage, six ont disparus.

 

La Deuxième Guerre mondiale

Lorsque les Allemands envahissent Le Havre en juin 1940, 14 remorqueurs du Groupe formé par « Les Abeilles » et ses filiales gagnent l’Angleterre, mais dés la Libération, ils réapparaissent pour reprendre leur rôle à l’exception de l’un deux qui se trouve affecté au port de Cherbourg, l’ Abeille 20 (550 CV).

C’est ainsi que reviennent les Abeilles 3, 4, 5, 6, 14, 16 et 21 au port du Havre.

Ceux restés en France sont saisis par les Allemands et seront retrouvés ici et là à la Libération, à l’exception de l’Abeille 24 qui, en 1940, saute sur une mine à Brest, de l’Abeille 8 qui, en 1942, est coulé sous pavillon allemand près des « sept îles » et de l’Abeille 10 qui disparaît sans laisser de traces.

Les remorqueurs sabordés et coulés dans le port de Nantes lors du départ des allemands sont renflouées par la compagnie des « Abeilles ». Puis remises en état elles rentrent en service au port de Nantes à l’exception d’une, trop gravement atteinte, l’Abeille 2 (400 CV). Ce sont les Abeilles 9, 15, 17, et 18.

L’Abeille 19  (650 CV) est retrouvée coulée à Bayonne, puis renflouée, remise en état et réexpédié au Havre. Il en va de même pour l’Abeille 16 (1 500 CV), retrouvée en bon état dans le port de Kiel après la capitulation.

L’Abeille 22 , quant à elle, est retrouvée à flot dans le port de Bordeaux, mais en trop mauvais état pour être réparée. La compagnie récupère aussi un matériel important de sauvetage (chalands, alléges, barcasses) ainsi que les vapeurs Rapide (1880), Commandant Emaille, Puissant (1920), Andromaque et Télémaque (les ex fourmis 1 & 2), Haleur n°4 et Malouin, et le Servannais.

 

 

L’après guerre et les 2 derniers accidents mortels

A la Libération, le chantier majeur et urgent pour la plupart des ports Français sera de se débarrasser des nombreuses épaves qui les encombrent et, puisque le renflouement constitue une des spécialités « Abeilles », la Compagnie y participera efficacement dans de très nombreux ports, à commencer par Le Havre où, de plus, en 1948, elle mènera à bien le complexe renflouement du paquebot Liberté.

Parallèlement, elle reprendra ses activités de remorquage portuaire avec ses anciens remorqueurs auxquels s’ajouteront, d’abord quelques remorqueurs d’occasion rachetés aux Anglais puis des remorqueurs neufs. De même, à Brest elle reprendra avec l’Abeille 25 (Ex. Salvonia) la station d’assistance précédemment assurée par l’Abeille 22.

Un métier qui n’a hélas rien perdu de ses dangers. Ainsi, le lundi 30 août 1954 à 8 h 36, le paquebot Atlantic éperonne l’Abeille 4 dans le milieu de la passe de l’entrée du port du Havre, faisant sombrer celle-ci en trente secondes et provoquant la mort de 7 personnes sur les 11 hommes d’équipage.

Le suivant se déroule en Seine le 29 mai 1965, lors du déséchouage du pétrolier suédois A.K. Fernstrom par 3 remorqueurs dont l'Abeille n°20, laquelle, dans un important "coup de gîte", précipite à l'eau trois de ses marins dont deux périront. Puis le 28 septembre 1967, c'est l'Abeille n°12 qui est chavirée par son remorqué : le pétrolier Jakob Maersk, causant la mort d'un marin-mécanicien.

Mona Lisa en remorque


Le dernier pour cette période, où la direction des Abeilles était encore assurée par la Famille Le Grand, se déroule à Cherbourg, le 8 avril 1969 avec l’abordage de l’Abeille 3 par le paquebot Europa, qui pivote autour de l’étrave du navire, précipite 3 matelots à la mer, faisant 2 victimes.

Sans jamais oublier tous ces marins décédés à son service, « Les Abeilles » poursuivent leur tâche, tant portuaire que de sauvetage.

Les années qui suivent cette après-guerre, laborieuses et fertiles en opérations exceptionnelles tels, par exemple, les renflouements du bananier français Guinée échoué près de Cherbourg en 1948, du bananier Mona Lisa échoué près de Dieppe en 1950, du Liberty-ship Western Trader échoué en Seine en 1951, du cargo français Equateur échoué sous le Cap Gris Nez en 1954, etc.…, verront à plusieurs reprises le renouvellement des remorqueurs afin d’assurer dans les ports, un service toujours de grande qualité auprès des navires de commerce en perpétuelle évolution et le long des côtes françaises, un service d’assistance efficace.

Mona Lisa 

Les Infos Dieppoises

Ces quelques lignes, nous présentent bien les dangers d’un métier de sauveteur, sont inspirées du livre de Jacques Pilon 

« l’Aventure du remorquage »
et de celui de Théodore Gazengel et Jean-Luc Déan :
«Les Abeilles : des navires, des hommes, une histoire .»


Nous les en remercions tous les trois.