LE TEll

Le Navire
Histoire
Naufrage
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Remerciements

  • Nom : Tell (Dit aussi Le Cimentier ou Les Canons de Fouras)

  • Type : Paquebot Mixte (Voile et vapeur)

  • Nationalité : Française

  • Construction : 11 mars 1879 Forges et Chantiers de la Méditerranée  La Seyne

  • Propriétaire : Compagnie de Navigation Mixte

  • Dimensions : Longueur : 76,60 m, Largeur : 10,40 m, Creux : 7,80 m  

  • Tonnage : 1264 tonneaux

  • Motorisation : Machine à vapeur 900 cv

  • Vitesse : Non Renseigné

  • Naufrage :  25 octobre 1913 Venant de Nice et allant vers Marseille Heurte un rocher entre Cap Camarat et la Roche Fouras

  • Coordonnées géodésiques : Non Renseigné 

Le Tell au temps de sa splendeur (Le Tell - Collection de Bernard BERNADAC)

 

 HISTOIRE

La Compagnie de Navigation Mixte a une très vieille histoire. Pourquoi mixte ?

On pourrait penser que cette vénérable compagnie marseillaise, créée par Louis Arnaud, Auguste et Félix Touache au milieu de notre XIXème siècle, avait comme motivation de concilier voile et vapeur, gros voiliers et petits cargos... Et non ! Le choix de ce terme fut plus technique.  Il s'agissait de mettre en pratique un concept unique de motorisation, dont le brevet fut acheté fort cher : la vaporisation était justement "mixte", tout d'abord à base d'eau puis, ensuite, pour récupérer les dernières calories, d'éther, liquide éminemment volatil et dangereux. A la suite de plusieurs incendies et de pertes corps et biens, cette invention explosive, du fait du risque inhérent au second système évaporatoire fut bien vite abandonnée.

 

 
 
 
Source : 100 épaves en Côte d'Azur de La Ciotat à St Tropez Anne et Jean-Pierre JONCHERAY

En outre, l'invention des machines dites "à multiples expansions" rendait obsolète l'emploi de fluides autres que l'eau. Le premier de ces navires s'appelait le Du Tremblay (qui effectua son premier voyage sur Alger en 1852 !) et le second l'Atlas.

Sait-on aussi que l'ancêtre des pétroliers français, la Radioleïne, fut armé par la "Mixte" en 1910 ?

Bref, en 1857 la "Compagnie" est la seconde de France et, en 1858, elle possède dix navires. Principalement axée sur le cabotage avec l'Algérie, elle arme aussi des lignes sur le Brésil.

La machine à vapeur développe près de mille chevaux, impressionnant pour l'époque... Une cheminée interminable et des superstructures basses caractérisent le bâtiment, par ailleurs gréé en deux mâts car, en ce temps là, la voile donnait un sacré coups de main à la vapeur ! Il s'agit du TELL.

On aurait pu croire que le TELL était indestructible, si l'on en juge par sa carrière parsemée d'échouages, de naufrages et de collisions, dont seulement les plus importants sont signalés ici.

Le vapeur a à peine une dizaine d'années lorsque, le 8 octobre 1889, il s'échoue à proximité du phare de Djidjelli en Algérie, par fort vent de nord-ouest et temps brumeux. Il est alors déséchoué.

Le 24 mai 1893, il s'échoue à l'embouchure du Rhône, au lieu dit Montille de Roustan. Allant de Sète à Marseille, avec un équipage de trente hommes, il talonne sous l'orage mais est déséchoué par un remorqueur et deux vapeurs.

Le 18 mai 1899, sortant du port de Marseille, il entre en collision avec le bâtiment espagnol CABOPENAS de Séville, pour une histoire controversée de refus de priorité. Les dégâts sont importants, l'affaire sera jugée, la sentence conclura aux torts réciproques.

Sept mois plus tard, le 10 janvier 1900, de retour de Naples avec 34 hommes d'équipage, 16 passagers et 150 tonnes de marchandise, il arrive à Marseille par fort mistral, mouille en attente à l'Estaque. Une ancre casse. Le TELL tente d'entrer au port et s'échoue lamentablement au Fort Saint-Jean, au lieu-dit "Les Pierres Plates". L'ange gardien qui le suit (sacré boulot !) depuis plus de 20 ans apaise le mistral et le remorqueur Salinier déséchoue le cargo. Il n'y a que quelques tôles tordues et deux pales d'hélice brisées.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

LE NAUFRAGE

Naufrage du Tell vu par Bernard Bernadac

 

 

Le 25 décembre 1913, le TELL subit son ultime échouement. Il a déjà 34 ans, ce qui n'est pas mal pour un cargo à vapeur, mais c'est

encore un bon navire. Ses 38 hommes d'équipage, commandés par le Capitaine ODDOU, le mènent de Nice à Marseille. Il y a à bord 600 tonnes de chaux et des fûts vides, à destination d'Alger via la capitale phocéenne.

Le vent d'est souffle avec violence. La nuit tombe. La brume enveloppe le navire qui avance au ralenti. Au large de la presqu'île de Saint-Tropez, et en particulier à l'approche des caps, le ressac et les courants laissent très peu de latitude aux marins, pussent-ils avoir mille chevaux à l'hélice !

Vers 5 heures du matin, le cargo s'encastre doucement entre le cap Camarat et la Roche Fouras, sur un écueil qui borde celui-ci. L'équipage met les embarcations à la mer et va se réfugier à la terre. En réalité, lorsque l'on connaît la puissance de la mer en cet endroit, on conçoit que le navire n'ait plus aucune chance. Le remorqueur Marseillais 28, qui vient de conduire des chalands à Saint-Tropez, et un autre navire de la Compagnie, le Mustapha, dérouté spécialement d'Alger, ne pourront rien tenter, pas plus que le Walkyrien, spécialisé dans les remises à flots. Le TELL s'enfonce rapidement. Seul, un mât sort de l'eau.

L'imminence de la Première Guerre Mondiale fera vite oublier ce modeste naufrage et, plus tard, un autre TELL sera lancé, qui disparaîtra en 1944.

La Compagnie de Navigation Mixte a subi de nombreuses transformations (fusions, changements de statuts) et elle demeure un acteur important de la vie maritime.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

LOCALISATION DU TELL

 (Photos aériennes réalisées par le GRIEME avec la complicité de Frédéric HULBERT)

LA PLONGEE SUR LE TELL

Photographie extraite de l'ouvrage Méditerranée mer cruelle de Pierre Gallocher

 

Depuis le sommet de la remontée rocheuse jusqu'à la lisière des posidonies, l'exploration est assez déconcertante tellement tout est mélangé. Un bon hectare de roches, de sable coquillier, de posidonies mélangées à des débris d'amphores (car l'endroit a toujours été funeste aux navigateurs) est plus ou moins recouvert de tôles, de tuyaux, de ciment solidifié et de vestiges difficiles à identifier.

L'arrière du TELL est encore structuré. Le plongeur peut y pénétrer non sans difficulté. Les restes sont, avec un peu d'imagination, reconnaissables. Curieusement, l'hélice en fer est passée à travers les ponts qu'elle a entaillés. La courbure de la poupe est conservée et le bastingage subsiste par endroits. Le pont n'existe plus, les superstructures ont glissé sur le côté. Des débris de vaisselle et même de l'argenterie en fragments informes sont collés aux parois de fer et mêlés aux nombreux sacs de ciment, éventrés par la houle. C'est curieux, mais les girelles aiment le ciment !

Non loin, une énorme chaudière a conservé ses tuyaux de chauffe en excellent état. Elle est coincée entre le rocher et les amas de posidonies. C'est le milieu du navire et c'est aussi la matérialisation de la cassure de la coque, car avant et arrière font un angle marqué.

Si elle est reconnaissable avec son étrave droite complètement à plat sur le fond accidenté, la proue a beaucoup souffert. Elle s'est étalée et fracturée en de multiples endroits.

Les vestiges de membrures, plus ou moins parallèles, sont écrasés, tordus et se fondent lentement dans le sédiment. Quelques hublots subsistent par leurs dormants rouillés. Le concrétionnement est spectaculaire. Une croûte épaisse d'algues calcaires et d'organismes fixés estompe les vestiges.

La visite s'effectuera donc autour du funeste rocher que les vestiges enserrent en quelque sorte. Côté Fouras, ce sera la proue aplatie contre la falaise. Côté Pampelonne, le milieu du bateau, avec la chaudière, n'est plus structuré et, côté Camarat, on reconnaît un peu mieux les éléments de la poupe qui ont conservé un certain relief.

Les sacs de ciment parsèment le site, certains entiers, pris en masse, d'autres fragmentés en squames blanchâtres.

MA PLONGEE SUR LE TELL 

Mercredi 3 octobre 2007

 

C'est lors de la participation du GRIEME au chantier de fouille que Jean-Pierre JONCHERAY a organisé sur le Prophète, en octobre 2007, que j'ai eu l'occasion de plonger sur le TELL.

Plus familier des épaves situées à proximité de la presqu'île de Giens comme le Donator, le Michel C ou le Ville de Grasse, je n'avais jamais "poussé plus à l'est" excepté pour y découvrir régulièrement le Rubis, le Prophète, l'Espingole et le Togo.

Yvon ayant aiguisé la curiosité de notre ami Jean-Pierre, ce dernier a décidé que nous irions rendre une petite visite au TELL afin d'avoir le "coeur net" sur quelques points de divergence à propos de cette épave et de ce qu'elle recèle encore !

En ce mardi 3 octobre 2007, nous sommes donc en route pour plonger sur le TELL. Comme à l'habitude au GRIEME, toute immersion commence par quelques lectures relatives à ce que nous allons découvrir.

C'est dans le livre de Jean-Pierre JONCHERAY (100 épaves en Côte d'Azur de La Ciotat à Saint-Tropez) que nous trouvons tout ce qu'il nous faut savoir sur ce navire.

A priori, ce que j'ai lu dans l'ouvrage de Jean-Pierre laisse à penser que le TELL est un peu "abîmé" et déstructuré ! Qu'à cela ne tienne, nous verrons bien, d'autant plus que je suis décidé à consacrer une partie de la plongée à prendre quelques clichés sous-marins, ceux que nous vous proposons aujourd'hui dans cette fiche épave.

Plouf ! C'est parti pour l'immersion sur ce navire dont je ne connais rien ! Les premières sensations ne sont pas fameuses. Il est clair que je suis du mauvais côté de l'épave, sur la partie de l'éperon rocheux la moins intéressante mais qui, malgré tout, offre déjà quelques vestiges (cf. les deux premières photos de la séquence ci-dessous). Je sais qu'il va falloir que je "passe" de l'autre côté de cette paroi, qui remonte à -3 mètres, pour retrouver la zone la plus riche en vestiges. Les derniers coups de palmes font un peu plus mal aux cuisses. Un sympathique petit courant contraire me barre la route. Heureusement, Yvon et sa "mobylette" élimine en quelques secondes cette difficulté pour me projeter vers le point le plus passionnant !

Cette seconde partie est sans commune mesure avec la première et, sans conteste, nettement plus riche. Au premier abord, je ne découvre pourtant qu'un fatras de métal, de tôles pliées et éparpillées dans tous les sens. Sans paraphraser les propos du livre de Jean-Pierre, il est difficile de se représenter la forme du navire. La reconnaissance complète du site permettra cependant de mieux imaginer ce que pouvait être ce cargo.

Au bout d'un moment la reconstitution "se dessine" progressivement dans l'esprit : l'arrondi de la poupe, la chaudière, un condenseur, les membrures, les restes du gouvernail, la cargaison composée de sacs de plâtre, et encore de la tôle ! L'avant est plus délicat à retrouver tellement les morceaux sont éparses.

Finalement qu'en dire que plus ? La faible profondeur et l'intérêt que le plongeur peut porter à cette épave fera toute la différence. Le regard posé, l'envie de tout voir et tout comprendre vous envahit. Au bout de 80 minutes d'immersion, je n'ai toujours pas le désir de remonter.

La photo sous-marine amène à découvrir l'épave autrement, à la regarder différemment. Je prends plaisir à chercher le meilleur angle, le cliché original et pour cela le TELL ne manque pas d'attrait. La lumière de la surface toute proche est une précieuse alliée, la visibilité est superbe, l'eau est chaude, on se sent bien au fond. Je me retourne vers la surface et je distingue parfaitement le bateau de Jean-Pierre comme s'il était à la portée de ma main... La mer, le ciel et le bateau de Jean-Pierre ne font plus qu'un !

Ces secondes magiques sont interrompues par une "petite tappe" sur l'épaule. C'est Dom qui vient à ma rencontre. Il est vraiment temps de remonter. Je confie notre appareil photo sous-marin à Dom et je commence doucement ma remontée vers la surface, abandonnant le TELL à mon ami (Voir ses commentaires ci-dessous).

Le TELL offre des instants plus qu'agréables qui n'ont rien à envier à ceux passés sur les grandes classiques du coin. Certes tout est différent mais il y a de quoi se "régaler" pour qui veut voir autrement... Accessible par sa faible profondeur, le TELL pourra se faire aimer des plongeurs "débutants" qui trouveront là matière à découvrir facilement les éléments disloqués d'un navire à vapeur.

Le dernier plus c'est que le navire recèle encore de bien beaux trésors, qui ne se révéleront qu'au prix de quelques efforts... Alors si vous passez par là, arrêtez-vous le temps d'une plongée et allez à la rencontre de ce navire qui saura vous faire vivre un moment très agréable.

Voilà, rien d'autre à rajouter si ce n'est vous conseiller de lire 100 épaves en Côte d'Azur de La Ciotat à Saint-Tropez,ouvrage dans lequel Anne et Jean-Pierre Joncheray vous dévoilent tout ce qu'il y a savoir sur le TELL comme sur bon nombre d'autres épaves.

Pascal alias Rotomagus (Webmaster du GRIEME)

Le GRIEME a engagé un programme de recensement photographique systématique des épaves qu’il plonge régulièrement, en Manche-Est, en Méditerranée, mais aussi à l’occasion de ses escapades tout au long du littoral français ou à l'étranger. La photographie constitue à nos yeux un complément à la vidéo, comme des arrêts sur images figeant le temps à un instant précis.

Le but est de faire découvrir, par l’image, le plus possible de nos "chères vieilles dames" que sont les épaves et notamment les plus modestes, les moins connues. Mais notre volonté affichée est aussi de revisiter les grands classiques. Avec l’œil passionné du GRIEME, parce que les plongeurs le savent bien, chaque nouvelle plongée sur une épave est différente des autres, parfois totalement. Visibilité, luminosité, ambiance, technique, réglages, état d’esprit du plongeur… Autant d’occasions de voir, d’appréhender et de fixer sur la pellicule, ou sur la carte-mémoire, l’épave sous un angle nouveau.

Et puis, aucune de ces vieilles carcasses n’est figée. Chacune d’elles subit, jour après jour, les outrages du temps… et des hommes. Autant dire que l’instantané d’une photo ne vaut que pour un temps, plus ou moins long. Mais, au-delà, il vaut plus encore pour la mémoire, pour la postérité, lorsque plus rien ou si peu ne laissera à penser aux plongeurs du futur qu’il y avait là une épave. Imaginez un instant que les épaves antiques, en leur temps, aient pu être photographiées !

Alors ne nous en privons pas. Pour le plaisir de tous, et aussi pour le notre.

Dominique Mazier dit "Dom"

Vue du fond du TellHublot du Tell
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

SÉQUENCE PHOTOS - VIDÉOS

Posé sur la roche à quelques mètres de la surface

(Reproduction interdite sans autorisation du GRIEME)

De l'autre côté de l'éperon rocheuxUn condenseurParties hautes des membrures
Chaudière du TellSacs de platre, la cargaison du TellLa poupe du Tell
Chaudières du TellVue de la poupe du TellUn des trésors du Tell
 
 
 
 
Partie du gouvernail du Tell
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 
 
 
 
 

REMERCIEMENTS & BIBLIOGRAPHIE

Sources : 100 Épaves en Côte d'Azur de la Ciotat à St Tropez  Anne et Jean-Pierre JONCHERAY

  Pour en savoir plus sur le TELL Pour découvrir de fabuleuses histoires d'épaves en Méditerranée

Anne & Jean-Pierre Joncheray Portrait d'Épaves et/ou 100 épaves en Côte d'Azur de La Ciotat à St Tropez

 

PHOTOGRAPHIES AERIENNES GRIEME avec la complicité de Frédéric HULBERT