INTRODUCTION
Le navire que les plongeurs et les pêcheurs ont pris l’habitude de nommer, à Hyères, le Michel Say, peut-être en souvenir de l’homme d’état de la troisième République, peut-être par analogie avec l’industrie sucrière, le Michel Say donc, s’appelait en réalité le Michel C.
Le Michel C repose à quelques centaines de mètres au sud, sud-ouest du phare de l'île du Grand-Ribaud, à la limite de jolis fonds rocheux, entouré de posidonies. Non loin gît également l'épave de la Ville de Grasse qui repose, elle, sur un sable vaseux.
Ces deux navires "dorment" dans la "petite passe", entre Giens et Porquerolles.
LE NAVIRE -
HISTOIRE
Construit en Irlande en 1866 par les Chantiers Renfrew de Belfast, il s'appelait alors Correo de Cette, n'avait qu'une hélice et appartenait à l'armement Sala qui, comme son nom l'indique, l'utilisait sur sa ligne française. En 1894, il est vendu à la compagnie Castaldi de Marseille. Cette compagnie, fondée en 1888 et dissoute en 1899, utilisait plusieurs navires aux noms se terminant par « C », initiale du propriétaire : le Louis C sur Agde et Port-la-Nouvelle, l’Anaïs C sur Sète et Port-Vendres.
Ce vapeur de cabotage de 285 tonneaux, long de 39,25 m et large de 5,75 m le Michel C est équipé d'un moteur de 300 cv ce qui était assez remarquable pour un si petit navire. Le bateau possédait deux machines, deux arbres d'hélice, deux hélices et il atteignait la vitesse de 11 noeuds.
De 1897 à 1899, le Michel C passe chez L. Rimbaud et Cie, comme le Louis C. Puis, en 1899, la Compagnie Busk le rachète. Cette compagnie, fondée à Marseille sous le nom de Axel Busk et Cie, du nom d’un armateur d’origine suédoise, deviendra en 1919 la Compagnie Rudolf Busk, puis la Compagnie nouvelle de Navigation Busk en 1946.
Le Michel C est alors complètement transformé : les aménagements sont remaniés, et deux machines indépendantes, actionnant chacune une hélice, sont installées, ce qui était exceptionnel pour l’époque. Le vapeur, ainsi remis à neuf, atteignit, en août 1899, une vitesse de 11 noeuds. Arborant le pavillon bleu et or aux lettres NB, il devint un familier des ports du littoral méditerranéen.
En 1900, avec 9 navires, la Compagnie Busk pouvait desservir Port-Vendres, Agde, Sète,La Nouvelle, Nice (3 fois par semaine), Cannes, Antibes, Menton, Saint-Tropez et Toulon.
En 1897, le navire passe chez Rimbaud et, enfin en 1899, chez Busk. Il a trente-trois ans et on le remet à "neuf". A cette occasion, on double les machines et les arbres d'hélice. En 1900, la compagnie possède neuf navires qui assurent diverses lignes entre Menton et Port-Vendres.
Le 10 mars 1896, une mésaventure était déjà arrivée au Michel C : chargé de vin, en provenance de Sète pour Marseille, il s’était échoué près du phare de Faraman, à l’embouchure du Rhône, et n’avait dû son sauvetage qu’au jet à la mer de sa cargaison pour l’alléger. Cela ne l’avait pas empêché de reprendre son périple de caboteur, et nous arrivons dans la nuit du 26 au 27 novembre 1900.
LE
NAUFRAGE
La brume est dense, une petite brise du nord-ouest souffle, la houle vient de l’ouest. Le Michel C et ses 12 hommes d’équipage, en provenance de Marseille, se dirigent sur Cannes qu’ils n’atteindront jamais. Dans le chargement, varié, des bouteilles de bière et des sacs de farine. Le navire emprunte donc la passe des îles d'Hyères par temps brumeux.
Cette nuit là, un autre caboteur, appartenant lui aussi à la Compagnie Busk, se dirige de Nice vers Marseille. Il s’agit de l’Amphion, navire en fer construit en 1887 à Inverkeithing par Scotts & sons. Long de 43 mètres, avec 350 tx de jauge, il est donc légèrement plus gros que le Michel C. Il avançe à 10 noeuds.
Entre 2 et 3 heures du matin, la visibilité est très mauvaise. Il semble qu’aucun des deux navires n’ait aperçu les feux de l’autre, ou alors que l’île du Grand Ribaud ait caché les silhouettes des cargos, l’éblouissement de son puissant phare aidant. L’Amphion aborde le Michel C par bâbord, sur l’avant de la cheminée, et lui fait une voie d’eau telle qu’un mécanicien est noyé et qu’en une minute et demie le Michel C coule, encore imbriqué dans l’étrave du navire abordeur, qui le retient juste suffisamment de temps pour permettre aux 11 hommes d’équipage survivants de se précipiter, à peine vêtus, sur le pont, et de passer sur l’Amphion.
Les recherches sont vaines pour retrouver le matelot disparu, un breton de Paimpol nommé Goarin, marié et père de famille.
L’Amphion, lui-même en danger de naufrage du fait des graves avaries causant une importante voie d’eau à l’avant, rentre à Toulon.
C’est donc la seconde fois que le Michel C coule. Rappelez-vous la première catastrophe évoqué ci-avant. Ce ne fut pas le seul navire de la Compagnie Castaldi puisque le Louis C coula 5 fois en un demi-siècle et l’Anaïs C fut coulé à Marseille.
Le lendemain, le Directeur de la Compagnie, Axel Busck, vient s’enquérir des circonstances du sinistre. Le Michel C repose pour toujours au pied du Grand Ribaud, et on renonce à son renflouement. L’Amphion, réparé grossièrement à Toulon, regagne Marseille. Il aura encore une longue carrière : construit en 1867, soit à peu près en même temps que le Michel C, il sera revendu à la Compagnie Sicard en 1907, puis à la Compagnie Tacchéla en 1917, à 50 ans !
La Compagnie Busck étendra son réseau sur l’Algérie et la Tunisie. Passée sous contrôle de la Compagnie de Navigation mixte, elle n’existe plus depuis 1962.
La légende des navires à trésor s’empara alors du Michel C, et bientôt, on assimila son abordage à celui qui eut pour protagonistes, un demi-siècle plus tôt, le Ville de Grasse et le Ville de Marseille. Jacques Cousteau en dit quelques mots dans "Le monde du silence". Le scaphandrier Michel Mavropointis l’y décrivait comme un grand cargo de 100 mètres de long, singulière erreur pour un professionnel, ou alors exagération voulue. Il est d’ailleurs encore question, dans cet ouvrage comme dans "Plongées sans câbles", de Philippe Taillez, du «Michel Say».
Peu après la dernière guerre, il était connu sous le nom de «farinier de Ribaud», par analogie avec le «farinier des Mèdes», ou Marcel, situé plus à l’est.
ACCES SITE DE
PLONGEE
Sous l’eau, dans la petite passe de Porquerolles, le Michel C est le voisin très proche du Ville de Grasse. Cette proximité est fortuite et ne prouve rien, si ce n’est que la passe est très fréquentée, et que les collisions y sont à craindre.
Le site du Michel C est donc accessible principalement de la Tour Fondue (Presqu'île de Giens). Il est également possible d'effectuer une mise à l'eau au petit port du Niel. De l'autre côté de la presqu'île, la Madrague vous offre également une possibilité de de mise à l'eau et un peu plus loin, Carqueiranne pourra faire également une base de départ.
Bien évidemment, de nombreux club de plongée vous emmène directement sur le site du Michel C., notamment sur la presqu'île de Giens.
Le GRIEME vous recommande particulièrement le club SUB PLONGEE située chemin du Pousset (sur la droite en allant vers la Tour Fondue).
Une ambiance décontractée, relax et détendue vous y attendra. Pas de bousculade.... tout y est simple avec Philippe (Le Boss), Alain dit "Bob", Hervé et Michèle...
Vous y rencontrerez également des "figures" tels que "Pierrot", le préposé à baliser les épaves, "Nounours" et son sourire légendaire. Vous y croiserez des moniteurs venus "d'ailleurs", Daniel, Franck et bien d'autres.... Mais aussi des "acharnés et habitués" de SUB comme Juliette, Andréa, mais aussi des Italiens discrets, des Hollandais galants, des Belges un peu allemands... bref des tas de gens sympa.
Que vous soyez d'ici ou de là-bas, vous vous sentirez vite chez vous....
Sur le Michel C, c'est souvent la bousculade, surtout en Juillet/Aout. Nous vous conseillons d'éviter ces deux mois où les plongeurs sont trop nombreux...
Mais parlons plutôt du Michel C car cette épave est fort intéressante à plus d'un titre :
- proximité de la
côte,
- présence duVille de Grasse à
quelques dizaines de mètres,
- profondeur raisonnable,
- épave dans un état
particulier qui permet de bien distinguer certaines parties essentielles d'un
navire,
Attention néanmoins au courant, parfois assez fort, que l'on rencontre malgré tout. Bon nombre de "plongeurs confirmés" se sont parfois fait surprendre... alors prudence !
Le Michel C s’est casé tant bien que mal dans un amoncellement d’énormes roches. Il s’est posé sur ce fond irrégulier, sur le côté d’une avancée rocheuse: au contact de laquelle il a beaucoup souffert : adossé par tribord sur une paroi, il s’est penché sur bâbord, tandis que son flanc tribord lui-même s’affaissait sur les cales, remplies d’un enchevêtrement de ferrailles.
L’épave s’étend sur plus de 50 mètres, disloquée, et la reconstitution de sa forme primitive est fort délicate. L’étrave, bien droite, bien conservée, supporte encore une des deux ancres à jas et sa chaîne, l’autre ancre gisant sur le sol. Les bossoirs restent en place. La chaîne de l’ancre bâbord, couchée sur le sable, pénètre encore dans l’écubier du navire et se perd à l’intérieur. Le pont a disparu et la lumière entre à flot entre les barrots rouillés qui ne supportent plus de plancher de bois.
(Le Michel C vu de l'arrière par Patrice
STRAZZERA)
C'est aussi à l'avant au plus
profond, que vous pourrez découvrir un treuil et ce qui reste d'une grue de
Capon sur un gaillard encore entier mais où le pont a disparu. Deux
guindeaux sont facilement visibles, l'un en place et le second a glissé au sable
côté bâbord.
La partie centrale est celle qui a le plus
souffert. Le centre du navire offre un spectacle pitoyable : tôles informes,
grandes portions de carène brisées et amoncelées, membrures encore fixées sur
les plaques du bordage. Les chaudières et l’appareil propulsif ont bien résisté,
mieux que toute superstructure, mâts ou agrès, qui ont disparu depuis fort
longtemps.
La situation de l’épave, peu profonde, en équilibre sur des roches,
en porte à faux, explique son délabrement. La chaudière est une
partie forte intéressante et c'est bien évidemment, une pièce que l'on reconnaît
le plus facilement. Vous apercevrez également le condenseur "posé" sur la
chaudière.
Continuant vers
l'arrière, on découvre les deux machines double
expansion. Nous allons aborder maintenant la partie la plus curieuse du
Michel C ; a poupe avec une de ses hélices en fer, qui
a perdu toutes ses pales sauf une, pointée au bout d’un arbre qui ne tient plus
à rien.
Tout cela est en pleine eau, et vraiment inattendu, par 32 mètres de
profondeur. Un peu plus bas sur bâbord, le pont arrière a basculé en bloc, et on
peut observer des sortes de barrots rayonnant à partir de l’axe du gouvernail,
barrots nus et recouverts de concrétions.
Tout à l'arrière du navire gît le secteur de barre qui est très caractéristique de ce genre de navire, superbe à voir.
De nombreuses pièces métalliques jonchent le fond. Pour les amateurs, vous pouvez faire quelques "petites" incursions sous la tôle. Le pont arrière repose à quelques mètres sur le sable.
Le Michel C apparait souvent
comme banal, pourtant cette épave permet de bien distinguer les principales
parties d'une navire : proue, ancres et chaîne, grue, chaudière, arbre d'hélice,
secteur de barre et même une pâle d'hélice. De plus, l'environnement de l’épave
est asses exceptionnel.
Tout d’abord, il y a les mérous. Et il y a aussi le
peuplement des roches sur lesquelles s’est coincée l’épave : le relief est
varié, des vallées profondes séparent de gros éperons rocheux où on peut
observer, vers les 50 mètres de profondeur et à moins de 100 mètres du bateau,
de fort honnêtes branches de corail, perdues sur des tombants aux immenses
gorgones noires.
Enfin, il n'est pas rare de rencontrer loups, congres,
mostelles, "bête à pinces et a antennes" et la myriade de petits poissons
courant en Méditerranée.
En conclusion, une plongée classique mais très intéressante pour qui veut se donner la peine de regarder.
Non loin du Michel C, repose
le Ville de Grasse dont il ne reste plus grand chose si ce n'est que "le
squelette" des roues à aube et quelques pièces ici et la.... impressionnant
malgré tout et surtout provoque une ambiance toute particulière. Un must pour
les photographes.
Si votre niveau vous le permet, si les
conditions météo sont bonnes, si le courant n'est pas trop présent, si la
structure qui vous accueille est d'accord.... si et
seulement si toutes ces conditions sont réunies et que vous sentez le
truc... nous vous conseillons de faire dans la même plongée le Ville de Grasse et le
Michel C. Attention néanmoins à la consommation et aux paliers.....
mais l'expérience vaut d'être tentée.
Le sens logique est de "plonger" d'abord le Ville de Grasse et de rejoindre ensuite le Michel C qui se trouve à environ 90 m de distance.
Profondeur du Ville de Grasse = -49 à
-50 mètres environ
Profondeur du Michel C= -40 mètres environ
(Le Michel C croqué par Michel
TORCHE - Plongeur/Dessinateur du GRIEME)
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VISIONS ET IVRESSES DE
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(Sources : Dominique RESSE - Plongeur,
ami et membre du GRIEME depuis décembre 2007)
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SOUS-MARINES
Sources :
Jean-Pierre
JONCHERAY
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ODYSSEE - Tome
II de P.Strazzera
Dominique RESSE pour
sa mémoire et ses archives
(Membre du GRIEME depuis le 28/12/2007 -
AAC/76 - Petit-Couronne)